27 novembre 2019

 

Non, la Grande Tache Rouge de Jupiter ne disparaît pas !

 
Si nombre d'astronomes, professionnels comme amateurs, ont affirmé durant la dernière décennie - preuve photographique à l'appui - que la Grande Tache Rouge de Jupiter est en train de disparaître, il semblerait qu'ils se soient tous trompés.

Lors d'une conférence intitulée The Shedding of Jupiter's Red Flakes Does Not Mean It Is Dying présentée le 25 novembre 2019 au Washington State Convention Center à Seattle, le professeur Philip S. Marcus, de l'Université de Californie à Berkeley, a démontré que les photographies prises au cours de la dernière décennie ne démontrent pas que la célèbre formation jovienne est en train de mourir, contrairement à ce qui a souvent été affirmé. Au contraire, il n'existe aucune preuve que la dimension ou l'intensité du vortex qui en est à l'origine ait changé.
 

 

 
Vue détaillée de la Grande Tache Rouge de Jupiter dans toute sa splendeur. Crédit : Nasa.
Cliquer sur l'image pour agrandir.
 
Selon le Pr. Marcus, les formations nuageuses visibles dissimulent les véritables dimensions et la nature du vortex de la Grande Tache Rouge. Au cours du printemps 2019, des observateurs ont bien photographié de gros "flocons" rouges en train de se déchirer et de se dissocier des bords de la Tache Rouge, mais le chercheur a expliqué que ce phénomène de desquamation est un état très naturel et habituel du vortex partiellement recouvert de nuages, et non une indication de la disparition prochaine de la formation.

Philip S. Marcus explique comment une formation nuageuse est entrée en contact avec la Grande Tache Rouge, entraînant parfois des points de stagnation, où sa vitesse de rotation s'arrête brusquement, redémarre ou repart dans différentes directions. Ces points de stagnation, bien visibles, indiquent l'endroit où un nuage s'est disloqué en créant les flocons observés par les astronomes.

"La persistance de nuages non absorbés par la Grande Tache Rouge à la faveur de ces points de stagnation ne signifie pas la disparition du phénomène", déclare le scientifique. "L'apparition de petits tourbillons à l'Est et au Nord-Est de la tache au printemps 2019 et la fusion ultérieure de celle-ci avec certains d'entre eux n'annonce pas sa future disparition".

Marcus précise encore qu'un phénomène de circulation secondaire, entraîné par les différences de température des courants atmosphériques au-dessus et en-dessous du vortex, permet à la Grande Tache Rouge de perdurer au fil des siècles, compensant le déclin de son énergie résultant de sa viscosité, des turbulences qui l'agitent et des pertes de chaleur.

"Je pense que, à moins que quelque chose de cataclysmique ne se produise sur Jupiter, cela durera un temps indéfini, jusqu'à ce que les courants atmosphériques changent, je dirais donc probablement des siècles", a déclaré Marcus lors de la conférence. "Bien sûr, je viens probablement de lui donner le baiser de la mort et elle va probablement s'effondrer la semaine prochaine, mais c'est ainsi que la science fonctionne", ajoute le chercheur, non sans une bonne dose d'humour.

Jean Etienne

Sources principales :

Reports of Jupiter's Great Red Spot demise greatly exaggerated. American Physical Society, 25 novembre 2019.
Jupiter's Great Red Spot Storm Isn't Dying Anytime Soon. Space.com, 26 novembre 2019.
 

 

 
Une série d'images (en fausses couleurs) montrant la fragmentation répétée de la Grande Tache Rouge au cours du printemps 2019. Dans la première image, la desquamation est prédominante, du côté Est du vortex géant. Un "flocon" s'en détache ensuite, puis un autre, dans la cinqième image. Crédit : Chris Go.
 
 
 

 
Taille de la Terre en comparaison de la Grande Tache Rouge.
 

 
 
 
 

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