20 décembre 2019

 

Echec du vol inaugural de Starliner

 
Lancé ce 20 décembre 2019 par une fusée Atlas V en direction de la Station Spatiale Internationale, le nouveau vaisseau habitable de la Nasa CST-100 Starliner n'a pu atteindre son objectif et s'est retrouvé sur une mauvaise orbite l'empêchant de poursuivre sa mission.

Dans l'impossibilité de lancer ses astronautes dans l'espace par ses propres moyens depuis le retrait de la flotte de navettes spatiales en 2011, la Nasa espérait beaucoup de cette mission, un vol d'essai inhabité mais qui annonçait surtout la possibilité de s'affranchir rapidement de la dépendance des vaisseaux russes Soyouz. Hélas, l'échec subi aujourd'hui, même s'il ne remet pas en cause l'intégrité du programme, pourrait entraîner un retard considérable, alors que la société privée SpaceX a parfaitement réussi une mission identique… le 4 mars 2019.
 

 

 
Décollage du lanceur Atlas V emportant le vaisseau CST-100 Starliner. Crédit : Nasa.
 

Les faits

Une fusée Atlas V de United Launch Alliance a bien lancé avec succès le vaisseau spatial réutilisable de Boeing, le CST-100 Starliner, lors de sa première mission de vol d'essai orbital juste avant le lever du soleil ce matin du20 décembre. Cependant, alors que les observateurs s'étonnaient de l'absence de données de télémétrie sur les images diffusées - avec difficulté semble-t-il - par la Nasa, le vaisseau a connu une anomalie une quinzaine de minutes après le décollage, l'empêchant de rejoindre l'orbite prévue et a fortiori de rejoindre comme prévu la Station Spatiale Internationale (ISS).

Les causes

La séquence automatique prévoyait qu'une demi-heure après le lancement, soit un quart d'heure environ après sa mise en orbite, le vaisseau Starliner allume ses propres propulseurs afin de fournir l'impulsion supplémentaire lui permettant de rejoindre la Station Spatiale Internationale puis de s'y amarrer le samedi 21 décembre. Malheureusement, cette séquence automatique a échoué pour une raison inconnue et le vaisseau s'est retrouvé sur une orbite instable (on parle d'un périgée prévu alors de quelque 72 kilomètres, impliquant une rentrée dans l'atmosphère quasi immédiate).

Selon Jim Bridenstine, l'administrateur de la Nasa, une anomalie se serait produite dans la procédure, provenant vraisemblablement d'une erreur dans le système de chronométrage de la mission ayant "fait croire au véhicule que l'heure était différente de ce qu'elle était réellement", une erreur de synchronisation qui a fait que le vaisseau a utilisé beaucoup plus de carburant que nécessaire pour maintenir une orbite stable, et ne lui en laissant pas suffisamment pour rejoindre ensuite la Station Spatiale Internationale. Ainsi, Starliner a pu se mettre en orbite, mais il n'a pas atteint l'orbite correcte nécessaire pour atteindre sa destination.

Et quand la malchance intervient…

Lorsque la défaillance a été détectée suite à l'absence du signal de mise à feu des propulseurs, les techniciens de la salle de contrôle ont immédiatement transmis manuellement l'ordre d'allumage. Cependant, Starliner se trouvait à ce moment dans une zone d'occultation entre deux satellites de suivi et de relais des données (TDRS), et le signal n'est pas parvenu à temps.

Bien que plusieurs points restent à éclaircir, la suite on la connaît : Starliner se retrouve sur une orbite certes stabilisée, mais au prix d'une consommation de carburant beaucoup trop élevée, ne lui en laissant pas suffisamment pour poursuivre sa mission. "Nous ne comprenons pas la cause profonde de cela", a ajouté Jim Chilton, vice-président directeur de Boeing pour sa division espace et lancement, lors d'une conférence de presse.

Les équipes de la mission s'emploient actuellement à élever l'orbite de Starliner afin de le placer sur une trajectoire d'atterrissage à White Sands Missile Range au Nouveau-Mexique, très probablement tôt le dimanche 22 décembre dans la matinée, où la capsule devait initialement atterrir, en soulignant le fait que malgré la défaillance, "le vaisseau spatial semble sain".

Les données d'atterrissage seront particulièrement critiques, a expliqué Bridenstine, et constituent un objectif de test important en soi. L'équipe en charge de Starliner vise à ce que la capsule effectue un atterrissage en toute sécurité sur le même site où les futures missions en équipage vont atterrir, au Nouveau-Mexique. Mais il est nécessaire tout d'abord d'en savoir plus sur l'anomalie qui s'est produite afin de s'assurer que le véhicule peut rentrer en toute sécurité dans l'atmosphère terrestre, en particulier avant que des astronautes ne puissent y prendre place.

Bridenstine souligne toutefois que si des astronautes avaient été présents lors de cette mission, ils n'auraient pas été en danger et auraient été susceptibles de remédier à l'anomalie en prenant le contrôle du vaisseau par commande manuelle.

Cependant la véritable question est : quelle sera la conséquence de l'échec de cette tentative qui, somme toute, se résumait à accomplir une mission maintes et maintes fois accomplie avec succès par Roskosmos, opérateur de Soyouz, et surtout de SpaceX, dont la concurrence pourrait devenir à terme le pire cauchemar de la Nasa ? Et surtout, quel sera le retard subi par le programme Starliner, alors que la concurrence s'affirme de plus en plus ?

Jean Etienne

Source principale :

Boeing Starliner 

 

 
Le vaisseau CST-100 Starliner (vue d'artiste) durant sa rentrée atmosphérique. Crédit : Nasa.
 
 
 

 
Les responsables de la NASA et de Boeing organisent un briefing après le lancement pour discuter de l'anomalie survenue après le lancement du CST-Starliner le 20 décembre 2019. De gauche à droite : l'administrateur associé de la NASA pour le Bureau des communications Bettina Inclán, les astronautes de la NASA Michael Fincke et Nicole Mann, administrateur de la NASA Jim Bridenstine, Tory Bruno, président et chef de la direction de United Launch Alliance ; Jim Chilton, vice-président senior de la division Espace et lancement de Boeing ; Steve Stich, directeur adjoint du programme d'équipage commercial de la NASA ; Kirk Shireman, responsable du programme ISS de la NASA (Crédit : Joel Kowsky / NASA).
 
 
 

 
Les astronautes de la NASA Michael Fincke et Nicole Mann, qui devraient faire partie du premier vol avec équipage, s'expriment lors d'une conférence de presse au Kennedy Space Center de la NASA après le lancement du vaisseau spatial Starliner de Boeing, le 20 décembre 2019. (Crédit : Joel Kowsky / NASA)
 
 
 

 
Le vaisseau CST-100 Starliner au sommet du lanceur Atlas V. Crédit : Nasa.
 
 
 

 
 
 
 

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