"Cette asymétrie a toujours été un mystère dans
le système solaire", explique Anders Johansen, professeur
d'astronomie à l'université de Lund. En effet, la communauté des
chercheurs n’avait pas été en mesure d’expliquer pourquoi les deux
groupes d’astéroïdes ne contiennent pas le même nombre d’astéroïdes.
Cependant, Simona Pirani et Anders Johansen, ainsi que d'autres
collègues, ont maintenant identifié la raison en recréant le cours
des événements de la formation de Jupiter et la façon dont la
planète s'est progressivement dessinée dans ses astéroïdes troyens.
Grâce à des simulations informatiques
approfondies, les chercheurs ont calculé que l'asymétrie actuelle
n'aurait pu se produire que si Jupiter s'était formé quatre fois
plus loin dans le Système solaire, et avait ensuite migré vers sa
position actuelle. Au cours de ce lent voyage, les forces de
gravitation de la planète ont entraîné plus d'astéroïdes devant elle
qu'en arrière.
Selon les calculs, la migration de Jupiter
aurait duré environ 700.000 ans, soit environ 2 à 3 millions
d'années après sa formation comme sous forme d'un astéroïde de
glace, loin du Soleil. Son voyage vers l'intérieur du Système
solaire a suivi une trajectoire en spirale durant laquelle la
planète, tout en prenant du volume par accrétion de nombreux petits
corps épars, se rapprochait progressivement de notre étoile. Cette
trajectoire en spirale s'explique par les forces de gravitation des
gaz environnants dans le Système solaire.
"C’est la première fois que nous pouvons
prouver que Jupiter a été formée loin du soleil, puis a migré vers
son orbite actuelle. Nous avons trouvé des preuves de la migration
des astéroïdes troyens gravitant autour de Jupiter", explique Simona
Pirani, doctorante l’astronomie à l’Université de Lund et l’auteure
principale de l’étude.
Les simulations montrent en effet que les
astéroïdes troyens ont été attirés par Jupiter alors que celle-ci
n'était qu'une jeune planète sans atmosphère gazeuse, ce qui
signifie que ceux-ci étaient probablement constituée de blocs de
construction de composition similaire à ceux qui ont formé le noyau
de la planète.
En 2021, la NASA lancera la sonde Lucy, qui se
placera en orbite autour de six satellites troyens de Jupiter. Après
une longue phase d'approche comprenant deux assistances
gravitationnelles de la Terre, Lucy devrait successivement étudier
les deux groupes d'astéroïdes troyens entre 2027 et 2033. "Nous
pouvons en apprendre beaucoup sur le noyau et la formation de
Jupiter en étudiant les astéroïdes Troyens", annonce Anders Johansen.
Les auteurs de l'étude suggèrent également que
la géante gazeuse Saturne ainsi que Uranus et Neptune auraient pu
migrer de la même manière.
Jean Etienne
Sources principales :
Forskare avslöjar Jupiters okända resa.
Université de Lund, 22 mars 2019.
Consequences of planetary migration on the
minor bodies of the early solar system. Astronomy & Astrophysics, 12
février 2019.
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