18 mars 2019

 

Mercure entraîne un anneau de poussières dans son orbite autour du Soleil

 
Mercure entraîne dans son orbite un anneau de poussières, alors que les astronomes pensaient cela impossible, étant donné la proximité avec le Soleil, tandis qu'une population d'astéroïdes inconnue s'inscrirait dans l'orbite de Vénus.

Au cours de leur formation, la Terre et Vénus ont collecté et entraîné, par simple effet de gravitation, une grande quantité de petits débris et de poussières le long de leur orbite. Cependant, les chercheurs étaient convaincus que Mercure, en raison de sa faible masse et de sa trop grande proximité du Soleil, n'aurait pu conserver un tel anneau dans son sillage, rapidement balayé par le vent solaire et les puissantes forces magnétiques de notre étoile.
 

 

 
Illustration d'artiste montrant plusieurs anneaux de poussière entourant le soleil, dans le sillage des planètes en orbite. Des scientifiques ont récemment découvert un anneau de poussière sur l'orbite de Mercure et ont conclu que l'anneau de Vénus provenait probablement d'un groupe d'astéroïdes co-orbitaux non encore découverts. Crédit : Mary Pat Hrybyk-Keith / Centre de vol spatial Goddard de la NASA.
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"Ce n'est pas tous les jours que l'on découvre quelque chose de nouveau dans notre Système solaire", annonce Marc Kuchner, astrophysicien au centre Goddard Space Flight Center de la NASA à Greenbelt, dans le Maryland, "c'est presque sur le pas de notre porte".

"Les scientifiques pensaient que Mercure, contrairement à la Terre ou à Vénus, est trop petit et trop proche du soleil pour capturer un anneau de poussière", a déclaré Guillermo Stenborg, spécialiste du Soleil au laboratoire de recherche navale de Washington . "Ils s’attendaient à ce que le vent solaire et les forces magnétiques du soleil balayeraient tout excès de poussière sur l’orbite de Mercure."

Mais Stenborg et ses collègues ont démenti cette hypothèse en analysant les images transmises par STEREO-A, l'un des deux satellites du programme STEREO (Solar TErrestrial RElations Observatory, ou Observatoire des relations Soleil-Terre), en orbite autour de l'astre du jour depuis 2006. A l'origine, les chercheurs ont créé un modèle basé sur ces photos dans le but d'occulter les traces de poussières qui y étaient présentes, et qui pouvaient compliquer la compréhension des données collectées non seulement par STEREO, mais aussi par Parker Solar Probe récemment lancée par la NASA, ainsi que par d'autres programmes d'observation du Soleil.

Et… surprise ! Lorsque le modèle a été appliqué à l'ensemble de l'imagerie STEREO, les astronomes ont trouvé beaucoup plus de poussières qu'escompté.

"Il ne s'agissait pas d'une observation localisée", déclare le co-auteur de l'étude Russell Howard, également spécialiste de l'énergie solaire au Laboratoire de recherche navale. "Tout autour du Soleil, quelle que soit la position de la sonde, nous pouvions constater la même augmentation de 5% de la luminosité, ou de la densité de la poussière. Il y avait donc bien quelque chose là-bas, et un quelque chose qui s'étend tout autour du Soleil."

L'équipe de recherche a calculé que l'anneau de poussière s'étendait sur une largeur d'environ 15 millions de kilomètres.

Une population d'astéroïdes inconnue ?

Vénus, quant à elle, entraîne un anneau de poussières moins large, environ 10 millions de kilomètres, mais plus épais. Cependant, ces formations sont très diffuses. A titre d'exemple, la densité de l'anneau orbital de Vénus n'est que de 10% supérieure à celle de l'espace environnant, et si toute la matière qu'il contient était rassemblée, on obtiendrait un astéroïde de seulement 3,2 kilomètres de diamètre.

Dans une étude séparée, Kuchner et son compatriote astrophysicien du centre Goddard, Petr Pokorný, ont cherché à comprendre l'origine de la poussière composant l'anneau orbital de Vénus. Ils ont ainsi modélisé toutes les sources potentielles auxquelles ils pouvaient penser : objets de la ceinture d'astéroïdes principale entre la Terre et Mars (la principale source de l'anneau entraîné par la Terre), comètes en provenance du nuage d'Oort, comètes de la famille Jupiter, etc. Mais aucune ne fonctionne, selon les chercheurs.

De simulation en simulation, les scientifiques ont finalement identifié le coupable présumé : une population d'astéroïdes inconnus s'étant introduits en orbite solaire dans la trajectoire de Vénus. Encore fallait-il pouvoir le démontrer.

Le duo de chercheurs a donc construit un autre modèle, qui suit une population de 10.000 astéroïdes hypothétiques dans l'orbite de Vénus à travers 4,5 milliards d'années d'histoire du Système solaire. Dans cette simulation, environ 800 de ces roches spatiales ont survécu jusqu'à aujourd'hui, ce qui suggère qu'une telle population pourrait bien exister dans la trajectoire orbitale de la planète sœur de la Terre.

Que de tels objets aient échappé à la détection n'est pas surprenant. En effet, il est très difficile de repérer les astéroïdes à l'intérieur de l'orbite terrestre, car ils se perdent dans les reflets aveuglants su Soleil, expliquent les chercheurs.

La prochaine étape consistera à identifier et à observer ces astéroïdes insaisissables. "S'il y a quelque chose là-bas, nous devrions pouvoir le trouver", a déclaré Pokorny. Leur existence pourrait être vérifiée avec des télescopes spatiaux comme Hubble, ou peut-être des imageurs spatiaux interplanétaires semblables à ceux de STEREO. Les scientifiques devront ensuite répondre à d'autres questions : combien y en a-t-il et quelle est leur taille ? Est-ce qu'ils perdent continuellement de la poussière ou n'y a-t-il eu qu'un seul événement de dissolution ?

Jean Etienne

Sources principales :

Evidence for a Circumsolar Dust Ring Near Mercury's Orbit. The Astrophysical Journal Letters, 21 novembre 2018.
Co-orbital Asteroids as the Source of Venus's Zodiacal Dust Ring. The Astrophysical Journal Letters, 12 mars 2019.
 

 

 
Image d'artiste d'une des sondes STEREO de la NASA. Crédit : NASA.
 
 
 

 
Les deux sondes STEREO de la NASA en cours de montage, avant leur lancement en orbite solaire en 2006. Crédit : NASA. Cliquer sur l'image pour agrandir.
 

 

 
 
 

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