Les chercheurs
ont postulé qu'une couche isolante d'hydrates de gaz pourrait
exister sous la surface glacée de Sputnik Planitia. Les hydrates de
gaz sont des solides cristallins (clathrates) ressemblant à de la
glace, formés d'un gaz emprisonné dans des cages moléculaires. Très
visqueux, ils ont une très faible conductivité thermique et
pourraient donc expliquer cette barrière isolante entre l'océan
d'eau liquide et la croûte de surface glacée formant Sputnik
Planitia. Les simulations informatiques
réalisées par l'équipe couvrent une période de 4,6 milliards
d'années, remontant ainsi à la formation du Système solaire, et ont
montré l'évolution thermique et structurelle de l'intérieur de
Pluton et le temps nécessaire pour qu'un océan sous-marin gèle et
que la coque de glace qui le recouvre ait une épaisseur uniforme.
Ils ont simulé deux scénarios : l'un au cours duquel une couche
isolante d'hydrates de gaz était présente entre l'océan et la croûte
de glace, et l'autre dans lequel elle en était absente.
Il a ainsi été démontré que, sans couche
isolante d'hydrates de gaz, l'océan souterrain se serait
complètement gelé il y a des centaines de millions d'années, alors
que l'eau commence à peine à se solidifier en sa présence. En outre,
un million d'années sont nécessaires pour qu'une croûte de glace
d'épaisseur uniforme apparaisse au-dessus de l'océan, alors qu'en
présence d'une couche isolante d'hydrates de gaz, le même processus
prend plus d'un milliard d'années.
L'équipe estime que le gaz le plus probable
dans la couche isolante supposée est le méthane provenant du noyau
rocheux de Pluton. Cette théorie, dans laquelle le méthane est piégé
sous forme d'hydrate de gaz, est parfaitement compatible avec la
composition inhabituelle de l'atmosphère de Pluton : pauvre en
méthane et riche en azote.
Les résultats de la simulation confirment non
seulement la possibilité d'un océan liquide à longue durée de vie
existant sous la croûte glacée de Sputnik Planitia, mais suggèrent
aussi qu'une même couche isolante pourrait exister sous la surface
de bien d'autres objets célestes éloignés, ce qui démontrerait qu'il
existe bien plus d'océans d'eau liquide dans l'univers qu'on ne le
pensait auparavant.
"Cela pourrait signifier qu'il y a plus
d'océans dans l'univers qu'on ne le pensait auparavant, rendant
l'existence de la vie extraterrestre plus plausible", a déclaré
Shunichi Kamata de l'Université de Hokkaido qui dirigeait l'équipe.
Jean
Etienne
Sources principales :
Gas insulation could be protecting an ocean inside Pluto.
Université de Hokkaïdo, 21 mai 2019.
Pluto’s ocean is capped and insulated by gas hydrates.
Nature Geosciences, 20 mai 2019.
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