"Sur les sept millions d'étoiles
précisément étudiées par Gaia, nous en avions trouvé vingt qui
pourraient voyager assez rapidement pour échapper à la Voie Lactée",
explique Elena Maria Rossi, une des des auteures de l'étude basée à
l'Université de Leiden (Pays-Bas). Cependant, "plutôt que de
s'éloigner du centre galactique, la plupart des étoiles hypervéloces
que nous avions identifiées semblent se précipiter vers lui",
ajoute le co-auteur de l'étude Tommaso Marchetti. "Celles-ci
pourraient être des étoiles originaires d'une autre galaxie, fonçant
à travers la Voie Lactée."
Il est possible que ces intrus
intergalactiques proviennent du Grand nuage de Magellan, une petite
galaxie en orbite autour de la Voie lactée, ou qu'ils proviennent
d'une galaxie encore plus éloignée. Si tel est le cas, ils portent
l’empreinte de leur site d’origine, et les étudier à des distances
beaucoup plus rapprochées que leur galaxie mère pourrait fournir des
informations sans précédent sur la nature des étoiles dans une autre
galaxie, ce que l'on pourrait comparer à une étude du matériel
martien apporté à notre planète par certaines météorites.
"Les étoiles peuvent être accélérées à des
vitesses élevées quand elles interagissent avec un trou noir
supermassif", explique Elena Maria Rossi. "La présence de ces
étoiles pourrait donc être le signe de tels trous noirs dans les
galaxies voisines. Mais les étoiles ont peut-être aussi fait partie
d'un système binaire, projetées vers la Voie lactée lorsque leur
étoile compagnon a explosé en tant que supernova. De toute façon,
les étudier pourrait nous en dire plus sur ce type de processus dans
les galaxies voisines."
Une autre explication pourrait être que ces
étoiles "sprinteuses" pourraient être natives du halo de notre
galaxie, avant d'être accélérées et repoussées vers l'intérieur
suite à des interactions avec l'une des galaxies naines tombées dans
la Voie Lactée au cours de son histoire. Des informations
complémentaires sur l'âge et la composition de ces étoiles
pourraient aider les astronomes à clarifier leur origine.
A terme, "nous prévoyons d'obtenir des
mesures de vélocité 3D complètes pour jusqu'à 150 millions d'étoiles",
explique Anthony Brown, co-auteur, président du conseil
d'administration du Gaia Data Processing and Analysis Consortium. "Cela
nous aidera à trouver des centaines, voire des milliers, d'étoiles
hypervéloces, à comprendre leur origine plus en détail et à les
utiliser pour étudier l'environnement du centre galactique et
l'histoire de notre galaxie", ajoute-t-il.
Jean
Etienne
Sources principales :
Gaia spots stars flying between galaxies. The Royal
Astronomical Society, 2 octobre 2018.
A hypervelocity star with a Magellanic origin. Monthly
notices of the Oxford University, 4 octobre 2018. |