4 janvier 2019

 

Un calendrier égyptien basé sur l'observation d'une étoile variable

 
Rédigé il y a plus de trois millénaires, le papyrus Cairo 86637 est un calendrier contenant des prévisions basées sur des observations astronomiques combinant les périodes de la Lune et… d'Algol, une étoile variable, (re)découverte en 1783.

Située à un peu plus de 92 années-lumière de la Terre dans la constellation de Persée, Algol est une étoile de magnitude 2 autour de laquelle orbite un compagnon moins lumineux qui l'occulte lors de chaque passage, provoquant une baisse de luminosité tous les 2 jours et 21 heures. Il s'agit donc d'une binaire à éclipses, décrite pour la première fois par l'astronome amateur John Goodricke en 1783.

Cairo 86637

Le papyrus égyptien Cairo 86637 renferme diverses prévisions d'évènements heureux ou malheureux sur une année, basées sur l'humeur des dieux pour les temps à venir. Effectuant une étude statistique sur ces prévisions dont les dates sont scrupuleusement mentionnées, les astronomes Lauri Jetsu et Sebastian Porceddu, de l'Université d'Helsinki, ont pu déterminer qu'elles se basent sur les cycles lunaires, mais aussi sur les variations d'Algol, d'ailleurs personnifiée dans l'Egypte antique par le dieu Horus.

Ce papyrus est sans doute le plus ancien document historique faisant état d’observations d’une étoile variable à l’œil nu. Chaque jour d’une année égyptienne était divisée en trois parties dans ce calendrier, associées à un bon ou un mauvais pronostic. "Les textes concernant les pronostics sont reliés à des événements mythologiques et astronomiques", explique Sébastian Proceddu.

L'analyse statistique révèle que deux périodes statistiquement significatives de 29,6 et de 2,85 jours ont été notées avec une grande précision. Le premier cycle de 29,6 jours est claire­ ment celui de la Lune. Le deuxième représente la période de variabilité d'Algol, avec cependant une légère erreur puisqu'il fait mention de 2,867 jours, soit une différence de 0,017 jour ou 12 minutes. Mais cette erreur n'est qu'apparente, car ainsi que le précise Lauri Jetsu, "nous pouvons expliquer pourquoi la période d’Algol a augmenté d’environ 0.017 jours : la majoration de la période au cours des trois derniers millénaires pourrait avoir été causée par le transfert de masse observé entre les deux membres de ce système binaire".

Cette observation, qui remonte à plus de trois millénaires puisque le papyrus Cairo 86637 a été rédigé entre 1244 et 1163 avant notre ère, est la première qui confirme la majoration de la période d'Algol, et fournit aussi une estimation du taux de transfert de matière entre les deux étoiles.

Les anciens Égyptiens auraient donc fait des mesures précises qui fournissent des données utiles pour les astronomes contemporains ! "Il semble que la première observation d’une étoile variable a été faite 3000 ans plus tôt qu’on ne le pensait", ajoute Lauri Jetsu.

Jean Etienne

Sources principales :

Shifting Milestones of Natural Sciences: The Ancient Egyptian Discovery of Algol’s Period Confirmed. Plos One (étude complète).

Ancient Egyptians de­scribed Algol's eclipses, University of Helsinki.

Evidence of Periodicity in Ancient Egyptian Calendars of Lucky and Unlucky Days, Cambridge Archaeological Journal.
 

 

 
Le papyrus Cairo 86637 est à la fois un calendrier, et aussi le plus ancien document historique préservé d'observations à l'œil nu de l'étoile variable Algol. À l'intérieur du rectangle se trouve l'écriture hiératique du mot «Horus», qui signifie un dieu ou un roi. Crédit : Huffingtonpost & al.
 

 

 
 
 

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