Une anomalie dans le rapport isotopique de
l'eau détectée sur Phoebe, un satellite de Saturne, démontre que
celui-ci provient de régions très éloignées, vraisemblablement au
niveau de la ceinture de Kuiper ou au-delà, et invalide les modèles
de formation de notre Système solaire.
L'eau est composée de deux atomes d'hydrogène (H)
et d'un atome d'oxygène (O), H2O. L’ajout d’un neutron à un atome
d’hydrogène, appelé alors deutérium (D), augmente la masse d’une
molécule d’eau (HDO) d’environ 5%. Ce petit changement entraîne des
différences isotopiques dans la formation d’une planète, d’une lune
ou d’une comète, et modifie l'évaporation de l'eau après cette
formation. Le rapport deutérium sur hydrogène (D/H) est une
empreinte digitale de ces conditions de formation, incluant la
température et l'évolution dans le temps. En s'évaporant, la surface
de l'astre s'enrichit en deutérium.
Sur cette base, les modèles de formation du
système solaire indiquent que le rapport D/H devrait être beaucoup
plus élevé dans les parties externes froides que dans la partie
interne plus chaude où la Terre s'est formée. De même, le deutérium
est plus abondant dans les nuages moléculaires froids de notre
galaxie.
Pourtant, si certains modèles prédisent que le
rapport D/H devrait être 10 fois plus élevé pour le système de
Saturne que sur Terre, une nouvelle méthode de mesure à distance des
rapports isotopiques de l'eau et du dioxyde de carbone montre que ce
n'est pas le cas pour les anneaux et les satellites de Saturne… à
l'exception de Phoebe. Double anomalie…
Phoebe, un voyageur venu de loin et qui
sème le trouble
La découverte de ce rapport isotopique
inhabituel deutérium sur hydrogène (D/H) signifie clairement que ce
Phoebe provient d'une partie lointaine du Système solaire. En fait,
"le rapport D/H de Phoebe est la valeur la plus élevée mesurée à
ce jour dans tout le système solaire, impliquant une origine dans
les régions très froides, bien au-delà de Saturne", annonce le
Dr. Roger N. Clark, du Planetary Science Institute à Tucson
(Arizona).
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