Aux progrès s'appuyant sur la réalisation d'un
pancréas artificiel s'ajoute désormais la possibilité de régénérer
les cellules productrices d'insuline, dont l'absence provoque
l'apparition du diabète de type 1. Un immense espoir, qui pourrait
très bien transformer dans un proche avenir cette maladie
invalidante… en mauvais souvenir.
Le diabète de type 1 se caractérise par la destruction sélective des
cellules produisant l’insuline, une hormone permettant de réduire le
taux de sucre sanguin face à une augmentation subite suite à un
apport sucré. Ces cellules sont nommées cellules β pancréatiques.
Restaurer ces cellules constitue pour la médecine un défi majeur,
car les traitements actuels induisent souvent de graves
complications.
Cette restauration, véritable serpent de mer de la médecine, passait
par la possibilité de recréer ces cellules β en modifiant
génétiquement des cellules qui leur ressemblent, et qui ne sont pas
en carence chez les diabétiques : les cellules α, productrices de
glucagon.
Le glucagon
est une hormone hyperglycémiante (qui provoque une
augmentation de la quantité de glucose dans le sang)
sécrétée par les cellules alpha des îlots de Langerhans du
pancréas, et qui agit principalement sur le foie en
provoquant une glycogénolyse. Il possède des propriétés
antagonistes de l'insuline, qui est hypoglycémiante. |
Jusqu'à présent, l'approche utilisée
consistait à activer un gène déterminé, nommé Pax4, présent dans les
cellules α. Mais l'expérimentation avait aussi permis de découvrir
que ces cellules α étaient continuellement régénérées et converties
en cellules β, ce qui en constituait la principale source et
assurant l'équilibre entre les deux facteurs. Un énorme espoir de
combattre ce déséquilibre, mais pour cela, il était impératif de
trouver un composé capable de provoquer cette mutation, induite
génétiquement chez l'Homme. "Certes cette première avancée était
importante, mais il n’était pas possible d’agir de cette manière sur
le patrimoine génétique d’un être humain", explique Patrick
Collombat, directeur de recherche Inserm.
Dans ce nouveau travail, l’équipe de chercheurs vient de démontrer
que cet effet pourrait être induit sans aucune modification
génétique, grâce au GABA, un neurotransmetteur présent naturellement
dans l’organisme mais aussi disponible sous forme de complément
alimentaire.
L'acide
γ-aminobutyrique, souvent abrégé en GABA, est le principal
neurotransmetteur inhibiteur du système nerveux central chez
les mammifères et les oiseaux.
Les effets inhibiteurs du GABA contrebalancent les effets
excitateurs du glutamate. Un déséquilibre entre ces deux
neurotransmetteurs est impliqué dans l'épilepsie et
l'ischémie cérébrale. Sa formule brute est C4H9NO2. |
Et justement, les chercheurs de l’Inserm sous
la direction de Patrick Collombat démontrent que le GABA
(quelquefois utilisé en complément alimentaire) pourrait induire la
régénération des cellules produisant l’insuline. Cette découverte,
réalisée chez la souris et partiellement validée chez l’homme,
apporte un nouvel espoir aux patients atteints de diabète de type 1.
Chez la souris d’abord : le GABA induit la régénération continue,
mais contrôlée, des cellules alpha du pancréas et leur
transformation en cellules produisant de l’insuline. Les cellules
ainsi générées sont fonctionnelles et peuvent soigner plusieurs fois
un diabète induit chimiquement chez la souris.
Chez l’Homme ensuite : sur des ilots de Langerhans (qui contiennent
à la fois des cellules alpha et beta), les chercheurs ont observé
qu’après 14 jours de culture en présence de GABA, le nombre de
cellules alpha productrices de glucagon diminuait de 37% au profit
d’une augmentation de 24% des cellules productrices d’insuline.
Enfin, en transplantant l’équivalent de 500 ilots de Langerhans
humains chez la souris, les mêmes résultats ont été obtenus en
supplémentant quotidiennement l’alimentation des souris en GABA
pendant un mois. Ces résultats sont prometteurs quant à l’efficacité
probable de cette solution pour l’Homme. Des essais thérapeutiques
vont ainsi être prochainement initiés afin de déterminer si le GABA
pourrait effectivement aider des patients atteints de diabète de
type 1.
Jean
Etienne
Source principale :
Long-Term GABA Administration Induces Alpha Cell-Mediated Beta-like
Cell Neogenesis (Cell, Volume 168, Issues 1-2, p73–85.e11,
12 January 2017).
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