27 septembre 2016

 

Le lanceur Falcon 9 de SpaceX, un rêve éveillé ?

 
Annoncé en 2005 à coups de beaux spots publicitaires et de milliards de dollars de fonds budgétaires, le lanceur américain privé d'Elon Musk n'est toujours pas fiable plus d'une décennie plus tard. Ce que d'aucuns qualifient désormais de rêve éveillé va-t-il prendre fin ?

Pire, avec l'explosion survenue lors d'un simple essai au sol le 1er septembre dernier sur la base de Cap Canaveral en Floride, la fusée fétiche de SpaceX accuse trois échecs cuisants sur 29 lancements, soit un taux de fiabilité de moins de 90 %, remarque Laurent de Angelis, auteur du "Guide des lanceurs spatiaux" et éditeur de l'ouvrage "60 ans de coopération". Et de conclure qu'après un grand nombre d'efforts, la firme n'est toujours pas arrivée à assurer un fonctionnement stable du lanceur.

"Plus de 10 % d'échecs, c'est beaucoup trop pour un lanceur moderne", indique Laurent de Angelis, qui note que cependant, certains sites américains ne mentionnent pas le Falcon comme un échec. Pourtant, assure l'auteur, "c'est non seulement un échec, mais c'est encore pire que cela puisque l'explosion s'est produite au sol, et qu'un tel accident est aujourd'hui devenu un évènement rarissime".

Selon de Angelis, avec deux explosions en une seule année, SpaceX n'a plus droit à l'erreur. Tout nouvel échec mettrait l'ensemble du programme en grande difficulté, car aussi bien les opérateurs que les assureurs ne lui feraient plus confiance. Et cela d'autant que l'explosion du 1er septembre semble résulter d'une large brèche dans le système d'hélium cryogénique du réservoir d'oxygène liquide du deuxième étage, une technologie parfaitement maîtrisée par les autres opérateurs spatiaux et qui n'est plus considérée comme critique. De plus, la déclaration de SpaceX précisant que si "l'origine de la fuite n'est pas encore connue, elle n'aurait aucun lien avec l'explosion d'un lanceur identique (mission CRS-7) l'année dernière" ne fait qu'ajouter un motif d'inquiétude, car cela donne deux causes différentes de dysfonctionnement sur un lanceur pourtant annoncé comme fiable…

Le récupérable, une technologie prometteuse ?

Le spécialiste de longue date remarque également qu'à ce jour, aucun autre acteur majeur dans le domaine du spatial (Europe, Etats-Unis, Russie, Chine, Japon, Inde, Brésil…) ne s'intéresse réellement au concept d'étages de fusées réutilisables. "Si cette technologie était réellement prometteuse, il y a longtemps que les Américains, les Russes, les Européens ou les Chinois auraient présenté des projets", indique de Angelis. Même les accélérateurs de la navette spatiale, dont près de 300 exemplaires ont pris la route de l'espace, ne se sont jamais avérés réellement économiques.

Et de souligner qu'Elon Musk, P-Dg de SpaceX, a reçu près de 4 milliards de dollars de la Nasa. Pourtant, aucun lanceur n'est vraiment rentable selon les critères de l'économie libérale normale, puisque les opérateurs ne paient pas le coût du lancement réel. "Appliquer des critères de rentabilité au spatial restera encore longtemps du domaine du fantasme, il n'y a pas de réelle rentabilité", conclut Laurent de Angelis.

Autrement dit, selon le spécialiste, en cas de nouvel échec, le rêve éveillé d'Elon Musk pourrait très bien prendre fin.

Jean Etienne

 

 
 
Explosion de Falcon 9 lors d'un essai le 1er septembre dernier. Crédit : SpaceX.
 

 

 
 
 

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