26 septembre 2016

 

Stopper la production de métastases pour vaincre le cancer

 
En arrivant à stopper complètement la production de métastases d'un cancer du sein vers d'autres organes chez des souris de laboratoire, l'équipe du Dr. Noam Shomron, de l'Université de Tel-Aviv (Israël), vient de réaliser une avancée qui pourrait constituer le plus important progrès médical du XXIème siècle.
 

Le Dr. Noam Shomron

Selon le Dr. Noam Shomron, qui dirige le Genomic Intelligence Laboratory de l'Université de Tel-Aviv (Israël), le cancer du sein reste à ce jour le plus meurtrier des cancers chez les femmes, une sur huit y étant confrontée à court ou moyen terme. Pourtant, et nonobstant les énormes efforts déployés dans le développement de traitements sophistiqués et de plus en plus coûteux, la survie des malades 5 ans après le diagnostic de la maladie n'a augmenté que de 3% au cours des 20 dernières années, et les chances de guérison se réduisent drastiquement après le développement de métastases. Cette étape de la maladie constituant pratiquement un point de non-retour dans le pronostic vital, le Dr. Noam Shomron y a très logiquement concentré ses efforts, sans exclure toutes les retombées de la découverte sur d'autres types de cancers.

A la base, une constatation

Dans le cas du cancer, une métastase (en grec μετάστασις, du verbe μεθίστημι, je change de place) définit le déplacement d'une cellule tumorale depuis son site d'origine par voie sanguine ou lymphatique. Ainsi, il a été depuis longtemps constaté que le cancer de la prostate produit des métastases en direction des os, tandis que le cancer du côlon tend à métastaser dans le foie. De la même façon, chez les femmes, le cancer de l’estomac métastase souvent dans les ovaires.

Cependant, le volume important des cellules cancéreuses devrait s'opposer à un déplacement par le système sanguin, a fortiori lymphatique. Pour cela, elles changent de forme, se rétrécissant pour s'infiltrer dans la circulation sanguine, puis reprenant leur aspect initial dès qu'elles arrivent dans le nouvel organe afin de s'y enraciner et générer une nouvelle tumeur. C'est précisément le mécanisme de ce changement de forme que s'est attelé à résoudre le Dr. Noam Shomron et son équipe.

La première étape consistait à tenter d'identifier les gènes impliqués dans cette modification de forme de la cellule cancéreuse. Pour y arriver, les chercheurs ont mis à contribution d'énormes sases de données situées surtout en Israël, mais aussi à l'étranger, et croisé quatre types de données :
  • Les mutations de l'ADN observées cliniquement dans les cas de cancer du sein ;
  • Un sous-ensemble de gènes reconnus responsables de la modification de la forme de la cellule ;
  • Les gènes qui présentent des domaines de liaisons avec divers micro-ARN régulateurs susceptibles de provoquer l'inhibition d'un autre gène ;
  • Les données cliniques sur les mutations effectivement constatées chez les patientes atteintes de cette pathologie, telles qu'obtenues auprès du Pr. Eitan Friedman du Centre médical Sheba à Tel Hashomer, qui est actuellement le plus important hôpital d'Israël.

Un gène spécifique identifié

Un gène spécifique aux quatre groupes s'est alors dégagé, et les chercheurs ont alors fait l'hypothèse que sa désactivation pourrait réduire la production de métastases, donc de se déplacer d'un organe à l'autre. Pour cela, ils ont mis à contribution deux types de molécules de micro-ARN connues pour prendre le contrôle du gène concerné (miR-96 et miR-182), l'ont désactivé, avant de tester cette nouvelle thérapie sur des souris de laboratoire.

"Trois semaines après le début du traitement, toutes les souris traitées par les micro-ARN étaient presque totalement exemptes de tumeurs secondaires", annonce le Dr. Noam Shomron, qui ajoute : "Cela signifie que nous avons réussi à arrêter la propagation du cancer. Nous pensons que le nouveau traitement que nous avons mis au point, qui s’est montré efficace chez des souris de laboratoire, possède le même potentiel chez les femmes atteintes du cancer du sein en raison de la grande similitude entre les gènes examinés à la fois chez les souris et chez les femmes dans les tumeurs".

La recherche continue, d'immenses espoirs à l'horizon

Bien que l'effet ait été constaté au-delà de toutes espérances, le mécanisme d'action du micro-ARN reste encore à élucider. Si une utilisation future dans le traitement du cancer du sein paraît hautement probable, on ignore encore quel pourrait être l'action du micro-ARN sur des métastases déjà installées, et surtout si ce nouveau type de traitement pourrait être appliqué à d'autres types de cancers à métastases, c'est-à-dire la majorité d'entre eux. Tout en gardant à l'esprit qu'en l'absence de métastases, l'ablation ou le remplacement d'un organe atteint par un cancer signifierait la victoire quasi-totale contre cette maladie.

Jean Etienne

Source principale (et rapport complet) :

Local microRNA delivery targets Palladin and prevents metastatic breast cancer (Nature Communications, art. 12868, DOI : 10.1038/ncomms12868, 19 septembre 2016).

 

 

 

 

 
 
 

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