Une étude de l’ICTP (International Centre for
Theoretical Physics) de Trieste révèle les secrets du vol de ces
extraordinaires voyageurs en simulant leur stratégie de navigation
dans des flux d’air turbulents. Les planeurs du futur pourraient
s’en inspirer.
Comme le démontrent les oiseaux migrateurs et les pilotes de
planeurs, exploiter le soulèvement de masses d’air suite à leur
réchauffement représente une stratégie fondamentale pour augmenter
la portée du vol et minimiser le coût énergétique. Grâce à une étude
récente basée sur des simulations du flux atmosphérique et de
l’aérodynamique du vol, les chercheurs ont réussi à ramener ce
processus complexe à de simples modèles de comportement animal dans
lesquels un nombre limité d’informations suffit pour réussir à
rester en vol sans se poser pendant des semaines.
La recherche a permis d’identifier les stratégies de navigation les
plus efficaces dans des flux d’air turbulents, situation typique des
courants ascensionnels. Elle est le fruit d’une collaboration entre
Antonio Celani, chercheur de l'ICTP, le Département de Physique de
l’Université de Californie de San Diego (UCSD) et le Salk Institute
for Biological Studies.
Et tout cela sans instruments de navigation…
Les oiseaux migrateurs sont capables d’identifier les courants
thermiques et de s’y déplacer avec une précision supérieure à celle
des humains et les informations qui leur sont disponibles pour ce
faire est une question ouverte. Un aspect crucial pour voler
efficacement est d’identifier un courant ascensionnel et de
maintenir le vol en son centre, où le soulèvement est majeur. Quand
les oiseaux migrateurs atteignent la cime du courant, ils planent
ensuite en direction du courant suivant et répètent le processus.
Ces courants atmosphériques étant invisibles, il est a priori
complexe d’en évaluer le potentiel d’ascension.
Pour comprendre comment les oiseaux réussissent si bien à maitriser
ce processus de vol, les chercheurs ont essayé d’identifier les
informations locales nécessaires, comme la température et la vitesse
du vent, pour trouver et exploiter les courants. De plus, étant
donné que les oiseaux n’ont pas les instruments pour prévoir
l’évolution des dynamiques atmosphériques, les scientifiques ont
évalué la possibilité qu’ils puissent "apprendre" à voler dans les
courants. Ils ont pour cela mis au point des algorithmes afin de
simuler les trajectoires ascendantes et descendantes des oiseaux, et
voir s'il était possible d'élaborer une stratégie de vol basée sur
la répétition des tentatives et des erreurs, que l'on nomme
"apprentissage par renforcement".
Un mécanisme d'apprentissage d'une simplicité déconcertante
"Nous avons réalisé des simulations numériques de la couche limite
de l’atmosphère qui présente une séquence irrégulière de courants
thermiques ascendants et descendants sur un fond de fortes
fluctuations de vitesse," explique Celani. "Successivement, nous
avons conçu notre algorithme d’apprentissage pour identifier les
combinaisons de paramètres nécessaires pour obtenir le meilleur
résultat en terme d’efficacité de vol. De façon surprenante, seuls
deux types d’information se sont révélés nécessaires :
l’accélération verticale du courant et le moment mécanique, c’est à
dire la capacité du courant à donner un mouvement de rotation à
l’oiseau", explique le chercheur. "Après des centaines d’essais, en
encourageant les bons choix et en pénalisant les mauvais, les
simulations d’oiseaux ont appris à trouver le courant thermique
successif avec un taux de réussite très élevé."
Pour confirmer et approfondir ces résultats théoriques, les
chercheurs sont actuellement occupés à réaliser des expériences en
utilisant divers modèles de planeurs radiocommandés, en utilisant la
stratégie mise en évidence par leurs observations. Compte tenu du
potentiel commercial des véhicules aériens sans pilote, les études
théoriques sur ces systèmes à basse consommation d’énergie
pourraient avoir des impacts importants.
Jean Etienne
Sources principales :
How birds soar to great heights (University of California -
San Diego - Proceedings of the National Academy of Sciences, 2016;
DOI: 10.1073/pnas.1606075113).
Gli uccelli migratori ispirano gli alianti del futuro
(Galileo, 13 septembre 2016).
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