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Marie Kmita |
Une recherche effectuée au mois d'août dernier
a démontré que deux gènes, soit Hoxa13 et Hoxd13, portaient la
responsabilité de la formation des rayons des nageoires et de nos
doigts. "Ce résultat est très excitant, car il établit clairement
un lien moléculaire entre les rayons des nageoires et nos doigts",
affirme Yacine Kherdjemil, doctorant du laboratoire de Marie Kmita
et premier auteur de l'article paru très récemment dans Nature.
Cette transition de la nageoire au membre tel que ceux qui nous
équipent ne s'est cependant pas faite d'un coup de baguette magique.
L'analyse des fossiles nous indique que nos ancêtres étaient
polydactyles, c'est-à-dire qu'ils étaient dotés d'un nombre de
doigts supérieur à cinq, ce qui soulève du même coup une autre
question clé : par quel mécanisme l'évolution a-t-elle favorisé la
pentadactylie (cinq doigts) chez les espèces actuelles ?
Hasard et génétique… et du coup, nous nous retrouvons avec cinq
doigts !
Une observation a particulièrement retenu l'attention de l'équipe de
la Dre Kmita : "Au cours du développement, chez la souris comme
chez l'homme, les gènes Hoxa11 et Hoxa13 sont activés dans des
domaines séparés du bourgeon de membre, alors que, chez le poisson,
ces gènes sont activés dans des domaines chevauchant la nageoire en
développement", relève la chercheuse, par ailleurs directrice de
l'unité de recherche en génétique et développement de l'Institut de
recherches cliniques de Montréal (IRCM) et professeure-chercheuse à
la Faculté de médecine de l'Université de Montréal.
Et pour mieux illustrer l'importance et la portée de cette
découverte, Yacine Kherdjemil a démontré par l'expérimentation qu'en
implantant la séquence d'ADN responsable de la transition de
l'activité du gène Hoxa11 chez la souris, les descendants de
celle-ci présentent jusqu'à sept doigts par patte, ce qui signifie
un retour au statut ancestral.
"Cela signifie que ce changement morphologique majeur ne s'est
sans doute pas fait par l'acquisition de nouveaux gènes, mais
simplement par la modification de leurs activités", conclut la
Dre Marie Kmita.
Du point de vue clinique, cette découverte renforce l'idée que les
malformations survenant au cours du développement du fœtus ne sont
pas uniquement induites pas des mutations génétiques, mais peuvent
provenir d'un autre type de mutations dans les séquences d'ADN, que
l'on appelle séquences régulatrices. "À l'heure actuelle, les
contraintes techniques ne permettent pas l'identification de ce type
de mutation directement chez les patients, d'où l'importance des
recherches fondamentales qui utilisent des modèles animaux",
commente Marie Kmita.
Jean
Etienne
Source principale :
Evolution of Hoxa11 regulation in vertebrates is linked to the
pentadactyl state (Nature – 5 octobre 2016 – doi :
10.1038/nature19813).
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