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Hans Guido Mutke
peu avant son décès, en 2004. |
"Le lendemain 9 avril, j'ai décollé à bord du
Me262 "Weiße 9" pour un second vol d'écolage, programmé entre 15:25
et 16:15 hrs, atteignant cette fois l'altitude de 12.000 m. Mais
même à cette altitude l'avion grimpait encore et j'ai l'impression
que j'aurais pu le mener jusqu'à 14.000 m. Les conditions de vol
étaient excellentes, seuls quelques petits nuages épars garnissaient
le ciel et la visibilité en altitude était supérieure à 100 km. Ma
radio était réglée sur la fréquence des combats, à ce moment
l'aviation alliée effectuait des patrouilles régulières sur le sud
de l'Allemagne autour des bases de Je262."
"Notre instructeur principal, Oberstleutnant Bär, était aussi en
vol et coordonnait la mission. Un autre élève pilote, le
sous-officier Achammer, effectuait son premier vol d'entraînement
sur un Me262. Soudain, l'instructeur l'a averti qu'un Mustang
américain l'attaquait par derrière. Achammer aurait pu rompre le
combat et rejoindre la base, mais excité, il a préféré faire front.
Je me trouvais à ce moment à 12.000 mètres au-dessus de lui. J'ai
immédiatement viré sur l'aile gauche en entamant un piqué à pleine
puissance des moteurs à 40° pour arriver le plus rapidement possible
à la hauteur de mon camarade."
"Après quelques secondes, l'avion a commencé à vibrer puis a subi
des secousses de plus en plus violentes, la queue de l'appareil se
mettant à osciller d'un côté à l'autre. L'indicateur de vitesse
était à fond de butée (1100 km/h). L'avion était devenu totalement
incontrôlable, et les secousses étaient tellement fortes que je ne
pouvais même plus arriver à lire les instruments."
"Une seconde plus tard les vibrations se sont soudain
interrompues, mais bien que l'indicateur de vitesse soit toujours
bloqué sur 1100 km/h, je n'arrivais pas à redresser la trajectoire,
en dépit de tous mes efforts, l'avion piquait de plus en plus. J'ai
aussi essayé de faire des embardées à gauche et à droite en agissant
sur le gouvernail, sans succès car les commandes semblaient être
devenues inertes."
"Entre-temps j'avais coupé l'alimentation en carburant des deux
moteurs afin de réduire la vitesse. Cela m'a permis de reprendre
progressivement le contrôle de l'appareil et de relancer les
réacteurs. Mais je m'aperçus directement que je ne contrôlais plus
l'avion normalement, que celui-ci avait tendance à virer à droite en
entamant une montée, alors que je ne touchais pas aux commandes. Je
parvins à ramener la vitesse à 500 km/h, mais il était évident que
l'atterrissage serait risqué. Alors que le Me262 était conçu pour
atterrir à une vitesse standard de 250 km/h, c'est à 350 km/h que je
touchais la piste, car l'appareil manquait totalement de stabilité,
mais je réussis néanmoins à le poser."
"Après l'atterrissage, Oberstleutnant Bär examina l'appareil. Les
ailes avaient été déformées et plusieurs rivets manquaient, et il me
dit que j'avais dû dépasser la vitesse autorisée de 950 km/h. Je
niais énergiquement, car endommager un avion rare et précieux comme
le Me262 entraînait une punition sévère, et après avoir eu tant de
chance en vol, je ne voulais pas finir mes jours en prison. J'ai
donc affirmé que l'accident était probablement provoqué par un
défaut de construction."
Quant au sous-officier Achammer, son appareil a été touché par
l'Américain et son moteur a pris feu, mais il a pu s'éjecter à basse
altitude et a été récupéré indemne.
Il y avait eu auparavant plusieurs accidents inexpliqués de Me262.
Mutke subodore qu'ils ont pu se produire parce que les pilotes ont
passé le mur du son et l'ont payé de leur vie. "J'ai toujours dit
que le premier à avoir franchi le mur du son est le pilote inconnu",
dit-il, en référence au soldat inconnu. Il affirme également que des
documents découverts dans l'Ohio révèlent que des pilotes d'essai
britanniques ont pu passer en mode supersonique avec des Me262 à
l'automne 1945.
La solution, deux années plus tard
Il faudra attendre deux années, jusqu'en 1947, pour qu'un programme
de recherches explore la zone comprise entre Mach 0,8 et Mach 1 et
mette en évidence ce que les pilotes d'essais appelleront la "phase
de buffeting". Ce sera le programme X-1 de l'Armée de l'Air
américaine.
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