29 décembre 2016

 

Comment les végétaux dissipent le trop-plein d'énergie solaire

 
Si les végétaux ont appris à exploiter l'énergie lumineuse via la photosynthèse, un excès peut leur être dommageable. Ils ont donc appris à en dissiper le trop-plein… sous forme de chaleur.

La photosynthèse, c'est-à-dire la conversion d'énergie lumineuse en énergie chimique par les plantes, est essentielle à la vie sur terre. Un excès de lumière s'avère toutefois néfaste pour les complexes de protéines responsables de ce processus. Une équipe de scientifiques de l'Université de Genève (UNIGE) s'est attelée à l'étude d'une algue unicellulaire mobile, répondant au doux nom de Chlamydomonas reinhardtii et souvent utilisée comme modèle en biologie végétale, afin de déterminer de quelle façon ce minuscule végétal se protège contre un excès de rayonnement solaire.
 

Chlamydomonas reinhardtii

En effet, grâce à la photosynthèse, l'énergie du soleil est convertie par les végétaux en énergie chimique afin de produire des sucres pour se nourrir. La première étape de ce processus, qui se déroule dans des compartiments cellulaires nommés chloroplastes, consiste à capturer des photons de lumière grâce à la chlorophylle. Mais si la lumière est essentielle aux plantes, un excès de soleil pourrait endommager leur machinerie photosynthétique, ce qui affecterait leur croissance et leur productivité. Pour se protéger, les plantes activent alors un mécanisme de protection lorsque la lumière est trop abondante, mettant en action une chaîne de protéines capables de convertir cet excès d'énergie directement en chaleur afin de la dissiper.

Le processus repose sur l'action de récepteurs déjà connus sous l'appellation UVR8, qui avaient démontré leur capacité à produire une substance filtrante, véritable crème anti-solaire naturelle, lorsqu'ils perçoivent un excès de rayonnement UV. Les chercheurs genevois ont à présent démontré qu'ils provoquent aussi l'activation d'une "valve de sécurité" permettant de dissiper sous forme de chaleur l'excès d'énergie.

Produire des protéines qui dissipent l'énergie au lieu de l'absorber

"Ce sont les rayons ultraviolets de type B qui sont susceptibles de causer le plus de dégâts à l'appareil photosynthétique, et nous avons voulu savoir s'ils jouaient un rôle de déclencheur du mécanisme de protection et, le cas échéant, lequel", expliquent Michel Goldschmidt-Clermont et Roman Ulm, professeurs au Département de botanique et biologie végétale de la Faculté des sciences de l'UNIGE.

L'équipe de Roman Ulm avait découvert en 2011 l'existence d'un récepteur aux UV-B, baptisé UVR8, dont l'activation permet aux plantes de se défendre contre ces UV et d'élaborer leur propre "crème solaire" moléculaire. Les chercheurs découvrent aujourd'hui que, chez cette algue, ce récepteur déclenche un deuxième mécanisme de protection. "En effet, lorsqu'UVR8 détecte des UV-B, il active un signal qui enclenche, au niveau du noyau cellulaire, la production de protéines, qui seront ensuite importées dans les chloroplastes. Une fois intégrées à l'appareil photosynthétique, elles contribuent à détourner l'énergie en excès, qui sera dissipée sous forme de chaleur grâce à des vibrations moléculaires", détaille le Pr. Guillaume Allorent.

Chez les plantes terrestres, la perception des UV-B par ce récepteur est également importante pour la protection de la machinerie photosynthétique, mais le mécanisme n'a pas encore été élucidé. "Il est cependant crucial pour la productivité agricole et l'exploitation biotechnologique des processus photosynthétiques de mieux comprendre les mécanismes responsables de la photoprotection contre la lumière solaire et ses rayons UV-B", indique Michel Goldschmidt-Clermont.

Jean Etienne

Source principale :

UV-B photoreceptor-mediated protection of the photosynthetic machinery in Chlamydomonas reinhardtii (Proceedings of the National Academy of Sciences of the United States of America - vol. 113 no. 51 > Guillaume Allorent, 14864–14869, doi: 10.1073/pnas.1607695114).

 

 

 
Cette algue mobile a été utilisée comme modèle depuis les années 1960 pour, notamment, étudier le fonctionnement des flagelles végétaux, la photosynthèse et certaines particularités génomiques qu’elle partage avec des animaux. C'est chez cet organisme que la biogenèse des flagelles a été étudiée et que la présence d'ADN dans les chloroplastes a été découverte.
 

 

 
 
 

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