|
Linda
Pagani, docteure en psychologie scolaire, professeure
titulaire à l’École de psychoéducation et chercheur au
Centre de recherche du CHU Sainte-Justine de l’Université de
Montréal. |
Mme Pagani, ainsi que le doctorant François
Lévesque-Seck et les professeurs Isabelle Archambault et Michel
Janosz, ont basé leurs conclusions sur les données recueillies sur
un ensemble de 1035 enfants des deux sexes, nés en 1997 et 1998 et
suivis par l'équipe depuis leur naissance. Chaque année et alors que
les enfants étaient âgés de 1 an et demi à 7 ans et demi, leurs
parents ont indiqué si quelqu'un fumait dans le ménage. Ensuite,
chaque enfant a été évalué à la fois sur le plan social que
scolaire.
Globalement, 60 % des familles n'ont jamais été exposées à la fumée
du tabac, tandis que 27 % y ont été exposées de façon intermittente,
et 13 % de façon chronique. Les scientifiques ont ensuite analysé
ces données afin de déterminer si un lien existait entre
l'exposition précoce à la fumée de tabac et des signes ultérieurs de
déviance juvénile. Pour plus de sécurité quant à la validité des
résultats, un correctif a été appliqué afin de prendre en compte
différents facteurs de confusion comme l'exposition aux drogues ou à
l'alcool durant la grossesse, ou d'autres caractéristiques
parentales ou familiales. "Notre objectif était d'éliminer toute
autre condition préexistante de l'enfant ou de la famille qui aurait
pu jeter un éclairage différent sur nos résultats ou fournir une
autre explication", explique la chercheuse.
Des conséquences terribles
La différence entre les enfants des familles exposées à la fumée de
tabac et les autres se traduit, pour les premières, à une
augmentation de 19 % des problèmes de comportement, de 11 %
d'agressivité proactive, de 13 % d'agressivité préactive et de 14 %
des cas d'indiscipline scolaire. Le risque de décrochage scolaire à
l'âge de 12 ans se voit aussi augmenté de 10 %.
Les comportements antisociaux observés chez les enfants exposés dès
leur plus jeune âge à la fumée de cigarette, ainsi qu'à la fumée
tertiaire (composés chimiques solidifiés à plus long terme sur les
surfaces et plus persistants) se caractérisent par l'intention
proactive de blesser les autres, l'absence de sentiments prosociaux
et la transgression volontaire des normes sociales. L'agression, les
délits criminels, le vol, le refus de l'autorité et la destruction
de la propriété sont au nombre de ces comportements. Plus tard dans
l'enfance, les comportements antisociaux sont souvent associés à des
problèmes scolaires, souligne l'étude.
"Ces associations à long terme devraient encourager les décideurs
politiques et les professionnels de la santé publique à sensibiliser
les parents sur les risques pour le développement engendrés par
l'exposition à la fumée secondaire du tabac. De plus, les écoles
devraient incorporer ces connaissances dans leurs programmes à tous
les niveaux scolaires en vue de prévenir d'autres expositions
éventuelles aux neurotoxines", conclut Mme Pagani.
Jean Etienne
Sources principales :
Early Childhood Household Smoke Exposure Predicts Later Delinquent
Behaviour and Dropout Risk at Age 12 (Indoor Air, revue
scientifique officielle de l'International Society of Indoor Air
Quality and Climate, 21 novembre 2016. DOI: 10.1111/ina.12353).
Early childhood household smoke exposure predicts later delinquency
and dropout risk at age 12 (Scienmag, 21 novembre 2016).
|