21 décembre 2016

 

Première observation d'un effet quantique dans le vide spatial

 
Une équipe d'astronomes conduite par Silvia Zane, de l’University College London, a mis en évidence l'existence de particules quantiques dans l'Espace, par leur particularité d'agir comme des prismes en polarisant la lumière émise par une étoile à neutrons.

Bien qu’elle figure parmi les étoiles à neutrons les plus proches de la Terre avec une distance de 400 années-lumière, RX J1856.5-3754, située dans la Couronne Australe, se caractérise par une luminosité extrêmement faible. Afin d'observer cet astre en rayonnement visible, l'équipe a mis à contribution l’instrument FORS2 qui équipe le télescope Antu (UT1) de 8,2 mètres du VLT, poussant l'instrument à sa limite technologique.

L'expérience confirme une théorie de l'électrodynamique quantique vieille de 80 ans, qui décrit l’interaction de la matière et de la lumière à des niveaux subatomiques. Dans les années 1930 en effet, les physiciens allemands Werner Heisenberg et Hans Heinrich Euler avaient suggéré qu’un champ magnétique intense pouvait modifier l'orientation des ondes lumineuses, autrement dit leur polarisation.

Cet effet est à comparer avec un rayon lumineux traversant une vitre épaisse ou un prisme, ce qui entraîne sous certaines conditions un changement de polarisation d'une partie de la lumière. Celle-ci, selon la théorie, peut aussi se réaligner en traversant un champ magnétique intense. Dans un vide apparent, cet alignement est provoqué par les particules virtuelles qui partagent de nombreuses propriétés avec leurs homologues "réels", mais elles apparaissent et se neutralisent mutuellement grâce à l’indétermination quantique.

"S’il y a un champ magnétique suffisamment puissant, alors vous n’avez pas besoin d’un verre ou d’un prisme pour réfracter la lumière", selon Silvia Zane de l’University College London. Mais le champ magnétique doit être très intense. Utilisant des filtres polarisants, Zane et ses collègues ont d'abord observé la lumière émise par une étoile à neutrons. Puis ils l'ont comparée avec celle émise par des étoiles ordinaires environnantes.

Le résultat de l'observation est sans appel. 16 % du rayonnement lumineux de l'étoile à neutrons est polarisé différemment des étoiles de référence. Il s'agit là de la première démonstration de ce phénomène connu comme la polarisation du vide (vacuum birefringence). Sur la base de ces données, l’équipe a été capable de déduire l’axe de rotation de l’étoile.

Selon Herman Marshall, du MIT (Massachusetts Institute of Technology), cette découverte permet pour la première fois de détailler les étoiles à neutrons. La prochaine étape consistera à reproduire l'observation sur la base du rayonnement X, soit la valeur spectrale dans laquelle les étoiles à neutrons sont la plus active.

Si cette observation démontre l'interaction entre les particules virtuelles et leurs propriétés quantiques, on ignore encore si elle aura des applications en mécanique quantique ou en physique. Lorsqu'Einstein a proposé sa théorie de la relativité générale, il n’avait aucune idée qu’on pourrait un jour l’utiliser pour des systèmes de navigation. De même, il est probable que les conséquences de cette découverte ne montreront leur potentiel que sur des périodes très longues.

Jean Etienne

Sources principales :

The Development of the Space-Time View of Quantum Electrodynamics. 1er décembre 2016.

Evidence for vacuum birefringence from the first optical-polarimetry measurement of the isolated neutron star RX J1856.5-3754. Monthly Notices of the Royal Astronomical Society, 2 novembre 2016. Doi: 10.1093/mnras/stw2798.

Measurement of the Electromagnetic Coupling at Large Momentum Transfer. Physical Review Letters, 20 janvier 1997. Doi: 10.1103/physrevlett.78.424.

 

 

 
La polarisation de la lumière au travers de l'environnement d'une étoile à neutrons – Crédit : ESO
 
 
 
 
L'étoile à neutrons RX J1856.5-3754, dans la Couronne Australe. Crédit : Nasa - Observatoire spatial Chandra.
 

 

 
 
 

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