21 novembre 2016

 

247 nouvelles espèces de bactéries découvertes dans le tube digestif humain

 
Chez l'Homme, le tube digestif est une véritable terra incognita. Au point qu'une nouvelle technologie récemment développée a permis d'y découvrir non pas une, non pas deux, non pas dix, mais bien 247 nouvelles espèces de bactéries totalement inconnues à ce jour (je viens de vous entendre tousser…).

C'est au moyen de "Culturomics", une technique développée par l'équipe de Didier Raoult à l'Institut Hospitalo-Universitaire Méditerranée Infection basée sur la multiplication des conditions de culture des bactéries, que cette étonnante découverte a pu être accomplie. Une analyse de plus de 1000 échantillons prélevés dans le tube digestif humain ont révélé la présence de 1170 bactéries différentes, dont 247 d'espèces entièrement nouvelles et non référencées à ce jour.

Historiquement, la culture a été la première technique ayant permis aux scientifiques d'étudier les microbes, et d'établir le lien avec les maladies qu'ils causaient. Mais comme il s'agissait d'une procédure à la fois longue, fastidieuse et coûteuse, les microbiologistes l'ont progressivement abandonnée à la fin du XXème siècle, à mesure que progressaient les techniques moléculaires essentiellement basées sur l'ADN. Ainsi la métagénomique, une analyse moléculaire permettant d'identifier l'ADN des microbes, est devenue la méthode universellement utilisée pour explorer les microbiotes humains, entendez par là l'ensemble des micro-organismes vivant dans un environnement spécifique comme par exemple le microbiote digestif. Avec une limite cependant, car cette technique ne permet d'obtenir qu'une vision partielle du microbiote étudié et ses résultats ne sont que rarement reproductibles.
 
 

 
Escherichia coli, une des nombreuses espèces de bactéries présentes dans la flore intestinale.
 
Au cours de ces cinq dernières années, la microbiologie humaine a connu un essor considérable grâce à la généralisation d'une nouvelle méthode d'identification rapide et peu coûteuse des bactéries par spectrométrie de masse (MALDI-TOF). Celle-ci a permis à l'équipe de Didier Raoult de mettre au point une nouvelle technique nommée Microbial culturomics, basée sur la multiplication des conditions de culture, en faisant varier par exemple la composition du milieu de culture, la température d'incubation, l'atmosphère d'incubation, le pH du milieu de culture, couplée à une identification rapide des bactéries qui ont poussées par la spectrométrie de masse.

Outre les 247 bactéries totalement inconnues découvertes parmi 1170 espèces provenant d'échantillons prélevas dans le tube digestif humain (selles, estomac, intestin grêle et colon), les chercheurs ont également trouvé 269 bactéries qui n'avaient jamais été observées que dans l'environnement et jamais chez l'Homme, et 250 bactéries qui avaient déjà été isolées chez l'Homme mais jamais dans le tube digestif. Au total, la culturomics a permis de doubler le nombre de bactéries cultivées à partir du microbiote digestif humain.

L'ensemble de ces nouvelles espèces de bactéries est disponible dans des collections de souches internationales (Collection de Souches de l'Unité des Rickettsies, CSUR, et Deutsche Sammlung von Mikroorganismen und Zellkulturen, DSMZ), et accessible à la communauté scientifique, chacun pouvant ensuite utiliser ces souches pour rechercher un éventuel lien de causalité avec diverses pathologies.

Jean Etienne

Source principale :

Culture of previously uncultured members of the human gut microbiota by culturomics (Nature Microbiology, Article number: 16203, 7 novembre 2016, doi: 10.1038/nmicrobiol.2016.203).

 

 

 

 

 
 
 

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