29 juin 2016

 

LIGO a-t-il observé directement et pour la première fois la matière noire ?

 
Une équipe de scientifiques de l'Université John Hopkins (Maryland, USA), estime que les deux trous noirs à la source des ondes gravitationnelles détectées récemment par le réseau LIGO seraient en réalité des trous noirs primordiaux, qui pourraient expliquer la matière noire.

Composant 85 % de l'Univers, la matière noire n'a pourtant jamais été observée directement et seul l'effet gravitationnel qu'elle exerce sur son environnement permet d'en démontrer l'existence. Aussi, sa nature exacte est-elle encore l'objet de nombreuses théories, dont la plupart possèdent leur lot de partisans et d'adversaires.

Dans le premier cas de détection, les ondes gravitationnelles ont été produites par la fusion de deux trous noirs dont les masses étaient de 36 et 29 masses solaires. Mais pour les scientifiques de John Hopkins, ces masses sont à la fois trop importantes pour correspondre à des masses de trous noirs stellaires (c'est-à-dire résultant de l'effondrement gravifique d'étoiles), et bien trop faibles pour correspondre à des trous noirs supermassifs tels que ceux que l'on découvre au centre de nombre de galaxies. Par contre, elle est tout à fait compatible avec la masse de trous noirs primordiaux.

Les trous noirs primordiaux

Un trou noir primordial serait formé non par l'effondrement gravitationnel d'une ou de plusieurs étoiles, mais par l'effondrement de régions extrêmement denses de l'Univers primitif peu après sa formation. Selon la théorie du Big Bang, la pression et la température étaient si élevées dans les premiers instants qui suivaient le début de l'expansion que de simples fluctuations de densité de la matière auraient suffi pour amorcer un effondrement gravitationnel très rapide. Et alors que le reste de la matière aurait poursuivi son expansion pour aboutir à l'Univers tel que nous l'observons aujourd'hui, ces trous noirs qualifiés de primordiaux seraient restés stables et devraient encore être présents à ce jour.
 

Le Dr Simeon Bird.

Faute d'observations, et surtout dans l'incapacité de pouvoir différencier trous noirs et trous noirs primordiaux, les scientifiques restent sceptiques face à leur existence. Cependant, ceux-ci pourraient être tellement abondants dans notre Univers qu'ils pourraient s'identifier, au moins partiellement, sinon totalement, à la constitution de la matière noire.

LIGO a-t-il observé la matière noire ?

La naissance de l'Univers aurait ainsi produit de nombreux trous noirs primordiaux, invisibles par définition et trop petits pour être mis en évidence par effet gravitationnel, donc indétectés, qui se sont ensuite répartis équitablement dans l'ensemble de l'Univers en se rassemblant autour des galaxies. Selon l'équipe, qui appuie son hypothèse de cinq pages de calculs et d'équations mathématiques, ces trous noirs primordiaux pourraient constituer une base solide pour expliquer la nature de la matière noire. Mieux, en calculant le nombre, la répartition, ainsi que la probabilité que ces trous noirs s'assemblent en binaires et entrent en collision, l'équipe propose un taux de collisions qui correspond avec les observations de LIGO.

Aussi l'équipe, conduite par le Dr Simeon Bird (Carnegie Mellon University), estime-t-elle que lorsque LIGO a détecté les ondes gravitationnelles, il pourrait aussi avoir observé pour la première fois de la matière noire sous forme de trous noirs primordiaux. L'un des auteurs de l'étude insiste toutefois sur la nécessité de confirmer cette hypothèse par de nouvelles observations, tout en admettant que la matière noire pourrait très bien être constituée de trous noirs primordiaux, dont l'existence est suspectée depuis longtemps.

Jean Etienne

Source principale :

Did LIGO detect dark matter ? (Physical Review Letters 116, 201301 - 2016).

Sur notre site :

>>>  Première observation directe d'ondes gravitationnelles (12 février 2016).
>>>  Les deux trous noirs à l'origine d'ondes gravitationnelles auraient pu se trouver à l'intérieur d'une étoile gigantesque (19 février 2016).
>>>  Ondes gravitationnelles : et de deux ! (16 juin 2016).

 

 

 
Image simulée d’un trou noir (ici stellaire) situé à quelques dizaines de kilomètres d’un observateur et dont l’image se dessinerait sur la voûte céleste dans la direction du Grand Nuage de Magellan.
 

 

 
 
 

Retour

Commentez cet article dans le forum