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Physarum
polycephalum |
Des bactéries ont certes une
faculté d'adaptation, mais elle se produit sur plusieurs générations
et relève donc plutôt de l'évolution. Une équipe de biologistes a
donc cherché à apporter la preuve qu'un organisme unicellulaire
pouvait apprendre. Ils ont choisi d'étudier le protiste Physarum
polycephalum, une cellule géante apparue voici 500 millions d'années
qui vit dans les sous-bois des régions tempérées et fait preuve
d'étonnantes aptitudes, telles résoudre un labyrinthe, éviter des
pièges ou optimiser sa nutrition. Mais on savait très peu de choses
jusqu'à présent sur sa capacité d'apprentissage.
Comment dresser une cellule ?
Lors d'une expérience de neuf jours, une équipe de scientifiques du
Centre de recherches sur la cognition animale (CNRS/Université
Toulouse III Paul Sabatier) a confronté différents groupes de ce
protiste à des substances amères mais inoffensives, qu'ils devaient
traverser afin d'atteindre une source de nourriture. Un groupe était
ainsi confronté à un "pont" imprégné de quinine, un autre à un pont
de caféine tandis qu'un groupe témoin devait simplement passer sur
un pont non imprégné. Au tout début réticents à franchir les
substances amères, les protistes ont appris au fur et à mesure des
jours qu'elles étaient inoffensives et les ont traversées de plus en
plus rapidement, se comportant au bout de six jours de la même façon
que le groupe témoin.
La cellule a donc appris à ne plus craindre une substance
inoffensive après y avoir été confrontée à plusieurs reprises, un
phénomène que les scientifiques nomment habituation. Au bout de deux
jours sans contact avec la substance amère, le protiste retrouve son
comportement initial de méfiance. Par ailleurs, un protiste habitué
à la caféine manifeste un comportement de défiance vis-à-vis de la
quinine, et inversement. L'habituation est donc bien spécifique à
une substance donnée.
L'habituation est une forme d'apprentissage rudimentaire qui a été
caractérisée chez l'aplysie (un invertébré aussi appelé lièvre de
mer). Cette forme d'apprentissage existe chez tous les animaux, mais
n'avait encore jamais été trouvée chez un organisme dépourvu de
système nerveux. Cette découverte chez un protiste, lointain cousin
des plantes, champignons et animaux, apparu sur Terre environ 500
millions d'années avant l'homme, permet de mieux comprendre les
origines de l'apprentissage, qui précède de loin celles des systèmes
nerveux. Elle ouvre également la possibilité de rechercher des types
d'apprentissage chez d'autres organismes très simples comme les
virus ou les bactéries.
Source principale :
Habituation in non-neural organisms: Evidence from slime moulds,
Romain P. Boisseau, David Vogel & Audrey Dussutour. Proceedings of
the Royal Society B, 27 avril 2016. DOI : 10.1098/rspb.2016.0446.
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