Lorsqu'on évoque la matière noire, on se
l'imagine généralement sous la forme de particules invisibles et
insaisissables, à peine détectables, à la limite de ce que le
bestiaire particulaire peut offrir. Or, de nouvelles recherches
indiquent que leur taille pourrait être proche de celle d'une
cellule humaine.
Dans l'état actuel de nos connaissances, la matière noire doit
composer au moins 85 % de toute la matière dans l'univers, mais on
ignore encore tout de sa nature. Les scientifiques suggèrent
uniquement qu'elle doit exister sous une certaine forme afin que
notre univers puisse exister, et surtout se comporter tel que nous
l'observons.
En se basant sur ces seules observations, une équipe de chercheurs
de l’Université de Southern Denmark
ont décidé de déterminer la taille hypothétique de ces particules
réputées invisibles. Et les résultats sont surprenants, puisque
selon cette recherche, les particules de matière noire devraient
avoir une masse 1019 fois plus importante (10 milliards
de milliards) que celle d'un simple proton, soit environ 1
microgramme. A titre de comparaison, une cellule humaine pèse 3,5
microgrammes. Elles seraient ainsi tellement denses qu'elles
pourraient même créer des mini-trous noirs à elles seules.
Une nouvelle classe de WIMPS ?
Les chercheurs sont arrivés à cette conclusion
en créant un nouveau modèle de particule super lourde appelée PIDM (Planckian
Interacting Dark Matter). Ces particules supermassives
appartiennent à une classe de particules connues comme les Weakly
Interacting Massive Particles (WIMPS), les meilleures candidates
à l'heure actuelle pour expliquer la matière noire. Les chercheurs
estiment que les WIMPS sont 100 fois plus massives qu’un proton.
Leur existence est prédite depuis plusieurs années, mais elles n'ont
encore pu être mises en évidence jusqu'ici. Cependant, cela permet
d’envisager la possibilité que les particules de matière noire
peuvent être très différentes de ce qu'on a pu imaginer jusqu'à
présent.
Si cette théorie se confirme, il devient inutile de rechercher des
traces de matière noire dans les accélérateurs à particules, car
elles sont beaucoup trop grandes. Par contre, on pourrait en trouver
la trace dans le fond diffus cosmologique qui est la forme
fossilisée du rayonnement diffus du Big Bang. En effet, lorsque le
Big Bang s’est produit il y a 13,8 milliards d’années, l’univers est
entré rapidement en expansion, une période connue sous l'appellation
d'inflation, et dont l'étape suivante a consisté en un réchauffement
qui a permis de créer les particules que nous observons. Et c’est
pendant ce réchauffement que les particules supermassives de la
matière noire ont pu être créées.
Mais pour que ce scénario fonctionne, il faut que la température du
réchauffement soit supérieure par rapport à nos modèles
cosmologiques actuels. Une température qui a forcément dû laisser
une trace dans le fond diffus cosmologique, que les prochaines
expériences devraient pouvoir détecter.
Mais ces particules de matière noire demeurent
encore à l'état d'hypothèse et il faudra encore attendre au moins
une décennie avant une éventuelle confirmation.
Jean
Etienne
Source principale :
Planckian Interacting Massive Particles as Dark Matter
(Physical Review Letters, 10 mars 2016).
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