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Quelquefois, des caractères génétiques ayant
appartenu au passé d’une espèce, apparemment oubliés, sont
"récupérés" pour fournir une nouvelle voie à l’évolution. Exemple
par les fourmis.
Les espèces de fourmis appartenant au genre très divers Pheidole
possèdent le matériel génétique pour produire des "supersoldats"
géants, tout comme celui qui donne les ouvrières et les soldats
habituels. Pourtant, bien que ces espèces soient très diverses, la
caste des supersoldats est rare parmi elles. Le rôle de ces
supersoldats consiste à bloquer l'entrée de la fourmilière avec leur
très grosse tête, tout en taillant en pièces à l’aide de leurs
puissantes mandibules les fourmis envahisseuses des raids menés
contre elles, un comportement agressif toutefois peu répandu dans
leur environnement.
Une équipe internationale conduite par l’entomologue Rajenddhran
Rajakumar, de l'Université McGill à Montréal, QC, Canada, a démontré
que l'outil génétique responsable du développement des supersoldats
est apparu chez un ancêtre commun à toutes les espèces de Pheidole,
et que les actuelles conservent la capacité de produire de tels
guerriers à grosse tête, même celles qui ne l’ont jamais
systématiquement exploitée. Aux fins de démonstration, les
chercheurs ont pu induire le développement de ces supersoldats dans
l'une de ces espèces, P. morrisi, simplement en injectant aux larves
de l'hormone juvénile, ce qui montre que des facteurs
environnementaux peuvent récupérer et enclencher un mécanisme
génétique inutilisé, mais gardé en réserve.
Les auteurs vont plus loin et suggèrent que le fait de garder des
mécanismes de développement génétique ancestraux "sous le coude"
peut être un moyen important d'évolution de nouveaux traits
physiques chez les organismes, et non seulement chez les fourmis. La
recherche continue…
Jean Etienne
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