De nombreuses espèces de lézards ont la
capacité de régénérer partiellement de nombreux tissus lésés, comme
leur queue, une stratégie couramment utilisée pour échapper à leurs
prédateurs. Mais cela ne se passe pas toujours comme prévu.
Cette faculté de repousse ne se limite toutefois pas à la queue et
réserve encore bien des surprises. Ainsi, plusieurs études ont noté
la régénération spontanée d'axones, c'est-à-dire le prolongement du
neurone qui conduit le signal électrique les zones synaptiques, mais
aussi la régénération partielle de la mandibule inférieure, ainsi
que de parties de membres. Quant à la queue, elle peut être
abandonnée volontairement, ou par réflexe, suite à une stimulation
prédatrice, obéissant à un plan de fracture spécifique dans les
vertèbres et d'un mécanisme de fermeture rapide des vaisseaux
sanguins évitant l'hémorragie. La queue de substitution ne
comprendra pas de vertèbres, qui seront remplacées par une tige
cartilagineuse.
Ce délestage de l'appendice caudal, qui permet à l'animal de sauver
sa vie en se dégageant de l'emprise d'un prédateur, s'accompagne
aussi d'inconvénients. Sa nouvelle queue, moins mobile, lui sera
aussi moins utile et deviendra un handicap pouvant avoir des
répercussions négatives sur la reproduction, la communication
visuelle entre les spécimens d'un groupe et le déplacement
aquatique.
Dans certains cas cependant, il arrive que la queue ne se détache
pas complètement de l'organisme, mais y reste attachée par un
lambeau permettant son irrigation. Dans ce cas, une nouvelle queue
apparaîtra sans que la précédente ne soit abandonnée, donnant lieu à
une queue d'apparence bifurquée, ou même trifurquée, des cas
fréquemment signalés.
Récemment, un spécimen exceptionnel, et même unique, a été rapporté
à Cordoue (Espagne), où un lézard de l'espèce Salvator merianae
(aussi appelé Tégu noir et blanc) affublé de six queues régénérées a
été découvert. L'animal présente les traces d'une grave blessure qui
s'étendait sur toute la partie supérieure de la queue. De nouvelles
queues de tailles différentes prennent naissance en six points,
poussant perpendiculairement à l'axe de la queue d'origine.
Jean Etienne
Source :
Cuadernos de Herpetología.
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