7 février 2015

 

De mystérieuses molécules peuplant notre galaxie ont pu être cartographiées pour la première fois

 
En analysant la lumière de centaines de milliers d'objets célestes, les astronomes de la Sloan Digital Sky Survey (SDSS) de Johns Hopkins University ont créé une carte unique de molécules énigmatiques dans notre galaxie, responsables de certaines caractéristiques déroutantes observées dans la lumière des étoiles.

Les astronomes le savent depuis longtemps : de mystérieuses molécules absorbent une partie de la lumière émise par les étoiles. Ce phénomène mystérieux, que les astronomes appellent "bandes interstellaires diffuses" (Diffuse Interstellar Bands, ou DIB), sont restées une énigme depuis qu'elles ont été découvertes par l'astronome Mary Lea Heger du Lick Observatory en 1922. En analysant le spectre de la lumière des étoiles, elle a découvert l'existence de raies d'absorption inexpliquées, visiblement créées par "quelque chose" s'interposant dans l'espace interstellaire, entre les étoiles et la Terre.

Mais l'espace interstellaire est immense, et aucun indice ne permettait jusqu'à présent de situer les molécules responsables de ces raies d'absorption, même si une étude approfondie a permis de déterminer que les éléments chimiques responsables de celles-ci ne se trouvent pas dans l'atmosphère des étoiles, mais bien dans le milieu interstellaire, autrement dit, entre elles. Et quelles sont ces molécules ? Actuellement, la question n'est toujours pas résolue, même si les astronomes émettent l'hypothèse qu'il pourrait s'agir de macromolécules carbonées sous une forme gazeuse.

Une carte, pour une meilleure compréhension

Mais revenons à leur emplacement. Afin d'en obtenir une meilleure idée, les astronomes de Johns Hopkins ont réussi à en dresser une carte, avec une précision jusqu'ici inédite. "Voir où se situent ces molécules mystérieuses est fascinant", a déclaré Brice Ménard, professeur au Département de physique et d'astronomie à l'Université Johns Hopkins. Gail Zasowski, un autre astronome de Johns Hopkins qui a joué un rôle clé dans le projet, ajoute : "Cette nouvelle carte doit tenir compte de l'analyse d'énormes quantités de données en utilisant la puissance des analyses statistiques par les moyens informatiques les plus évolués".

L'équipe a analysé la lumière provenant de plus d'un demi-million d'étoiles, de galaxies, de quasars et a pu déterminer les caractéristiques des molécules dans les régions situées au-dessus et au-delà du disque de notre galaxie. En outre, les scientifiques ont été en mesure de caractériser les types d'environnements dans lesquels ces molécules sont plus susceptibles d'être observées. Certaines se rassemblent préférentiellement dans les régions denses de gaz et de poussière, tandis que d'autres forment plutôt des amas solitaires, loin de toute étoile.

"Ces résultats guideront les chercheurs vers de meilleures observations, leur permettant de concevoir de nouvelles expériences de laboratoire leur permettront de mieux cerner les propriétés et la nature de ces molécules énigmatiques", a déclaré Lan.

Afin d'observer en direction du plan galactique, dissimulé derrière d'épais nuages de poussière cosmique, les scientifiques ont utilisé les données du programme APOGEE (Apache Point Observatory Galactic Evolution Experiment). Celles-ci, effectuées dans le proche infrarouge, peuvent aisément voir à travers la poussière interstellaire et mesurer la propriété des étoiles partout dans la galaxie. Ils ont ainsi pu déterminer certaines des caractéristiques jusqu'ici inconnues des molécules se trouvant devant environ 60.000 étoiles dans un large éventail d'environnements, et même pu mesurer le mouvement de cette matière. "Pour la première fois, nous pouvons voir comment ces molécules mystérieuses se déplacent autour de la galaxie", a déclaré Zasowski. "Ce est extrêmement utile et apporte de nouvelles connexions entre ces molécules et la dynamique de la Voie Lactée".

"Près de cent ans après leur découverte, la nature exacte de ces molécules reste encore un mystère, mais nous effectuons un pas de plus pour comprendre de quoi elles sont faites", annonce Ménard. "L'ère du Big Data en astronomie nous permet de regarder l'univers de nouvelles façons. Il y a tellement de choses à explorer avec ces grands ensembles de données, et nous n'en sommes qu'au début".

Jean Etienne

Source :

The researchers used data from the Sloan Digital Sky Survey (Johns Hopkins University)

 

 

 
Cette carte de notre galaxie dresse l'emplacement des mystérieuses molécules responsables du phénomène appelé "bandes interstellaires diffuses". Crédits : TW Lan, G. Zasowski, B. Meacutenard, SDSS et 2MASS / UMass / IPAC-Caltech / NASA / NSF
 
 
 

 
Raies d'absorption provoquées par les molécules interstellaires, encore non identifiées. Crédit Nasa.
 

 

 
 
 

Retour

Commentez cet article dans le forum