26 juin 2015

 

Découverte d'outils antérieurs à l'apparition du genre Homo

 
Des outils vraisemblablement manufacturés par des Australopithèques ont été mis au jour au Kenya, à proximité du lac Turkana.

Il va falloir une fois de plus réviser l'histoire de l'avènement de l'Homme sur la planète, et tout particulièrement de l'apparition de la démarche intellectuelle permettant de franchir le cap depuis l'utilisation d'objets utilisés comme outils, vers la conception et la fabrication d'artefacts adaptés à une utilisation précise.

Cette découverte, qui remet en cause certaines de nos théories les mieux étayées, nous la devons à une équipe d'archéologues conduite par Hélène Roche, directrice de recherche au CNRS et responsable de la Mission Préhistorique Française au Kenya et co-responsable du West Turkana Archaeological Project dont l’objectif est de mettre en évidence l’évolution comportementale des hominidés de la fin du pliocène et du début du pléistocène ancien. Au cours de fouilles effectuées près du lac Turkana, des outils en pierre taillée vieux de 3,3 millions d'années ont été découverts, reculant de 700.000 ans l'âge des plus anciens outils attribués à l'Homme.

Cependant, l'implication la plus extraordinaire dans cette découverte est qu'elle enlève au genre Homo (Homo sapiens, Homo neanderthalensis) le mérite de la fabrication des premiers outils, et l'attribue dorénavant à l'australopithèque, une espèce nettement différenciée qui a précédé le genre Homo.

En début d'année 2015, une mâchoire retrouvée en Éthiopie avait déjà fait reculer de 400.000 ans l'apparition des hominidés pour la fixer actuellement à 2,8 millions d'années. Aujourd'hui, la découverte de nouveaux artefacts, et plus particulièrement de lourds blocs de lave qui ont servi à produire des éclats tranchants, l'équipe d'archéologues a bien dû se rendre à l'évidence : si le genre Homo est apparu il y a 2,8 millions d'années, ils ne peuvent avoir été fabriqués que par des individus plus anciens, assimilés à l'australopithèque.

La notion de conscience est mouvante

Jusqu'à présent, la théorie officielle voulait que la fabrication d'outils soit une des caractéristiques exclusives des hominidés, mais Hélène Roche n'est pas du tout surprise de ce bouleversement. L'archéologue du CNRS le soupçonnait déjà depuis longtemps. "J'avais déjà trouvé des outils que je pensais avoir été fabriqués par des australopithèques. C'était au milieu des années 70 et c'était prématuré, ça n'avait pas fait consensus". Aujourd'hui encore, "il y a des gens qui n'admettent pas que l'homme s'inscrive dans une lignée de primates".

Si l'utilisation d'objets comme outils peut être élargie à nombre d'espèces animales, la fabrication demande une intention et une projection théorique de l'objet final désiré. Si cette intentionnalité n'est plus une exclusivité humaine, cela va faire bouger les frontières de la notion de conscience. Pour autant, la distinction entre hominidés et australopithèques se fonde essentiellement sur des caractéristiques physiques et ne devrait pas être remise en cause par cette nouvelle découverte issue de la vallée du Rift.

Les fouilles se poursuivent actuellement sur le même gisement, et Hélène Roche est convaincue que de nouveaux outils attribués à l'australopithèque seront bientôt découverts.
 
 

 
Exemple d'artefact découvert par l'équipe du CNRS, présentant des traces de découpe par percussion.
 
 
 

 
Crâne d'australopithèque.
 

 

 
 
 

Retour

Commentez cet article dans le forum