Une étude en situation réelle sur les
interventions en milieu scolaire indique qu'il est possible
d'influencer les adolescents à risque.
En réaction aux changements rapides des contextes culturel et
juridique, des chercheurs de l'Université de Montréal et du CHU
Sainte-Justine ont découvert une façon de prévenir, de réduire ou de
retarder la consommation de cannabis parmi les jeunes à risque. Les
consommateurs de cannabis s'exposent à des déficits neurocognitifs,
à des réussites scolaires et professionnelles moindres, à des
accidents de la route, à des symptômes psychiatriques exacerbés et
au déclenchement d'une psychose.
Les adolescents sont particulièrement à risque puisque leur
cerveau est en développement
Les jeunes qui ont consommé de la
marijuana ont démontré une plus grande difficulté à maintenir leur
attention et à contrôler leurs impulsions ainsi que des processus
cognitifs altérés. "La consommation de marijuana est très
fréquente chez les adolescents en Amérique du Nord et en Europe",
souligne Patricia Conrod, docteure en psychologie, qui a mené
l'étude. "Dans un contexte où les attitudes et les lois par
rapport à la marijuana changent, il est important de trouver des
façons d'en prévenir et d'en réduire la consommation chez les jeunes
à risque. Notre étude révèle que des interventions brèves et
ciblées, effectuées par des professeurs formés, permettent
d'atteindre cet objectif".
L'étude portait sur 1038 élèves britanniques à risque élevé et leurs
professeurs dans 21 écoles secondaires de Londres. Les jeunes, qui
étaient en secondaire 4 (troisième année en France), ont été
considérés comme à risque élevé selon leurs réponses à une
évaluation de la personnalité validée en clinique.
Les personnes qui sont sujettes à l'anxiété ou aux pensées
négatives, qui sont impulsives ou à la recherche de sensations
fortes sont reconnues comme ayant un risque élevé de consommation de
drogues. "Les élèves ont participé volontairement à deux séances
cognitivocomportementales de 90 minutes, qui avaient été adaptées à
leur type de personnalité. Ces séances, qui leur donnaient
l'occasion d'apprendre à partir de scénarios réels expliqués par
d'autres jeunes à risque, ont été conçues pour donner des exemples
de mécanismes de gestion du risque. Le cannabis n'était pas
mentionné directement à moins que les élèves abordent le sujet",
explique Ioan T. Mahu, premier auteur de l'étude. "Bien que nous
ayons observé que le programme retardait la consommation de cannabis
en plus d'en réduire la fréquence chez tous les jeunes participants,
nos résultats indiquent surtout que le programme est
particulièrement efficace pour prévenir la consommation chez les
adolescents les plus à risque, ceux à la recherche de sensations
fortes", affirme Mme Conrod.
Environ 25 % des jeunes à risque élevé ont commencé à consommer
du cannabis pendant l'étude de deux ans
L'intervention a été associée à une
réduction de 33 % des taux de consommation de cannabis dans les six
premiers mois qui l'ont suivie, puis à une fréquence réduite de
consommation pour les six autres mois suivants. "Au sein du
groupe au risque le plus élevé, soit les jeunes à la recherche de
sensations fortes, l'intervention a été associée à une réduction de
75 % des taux de consommation de cannabis pendant les six mois ayant
suivi l'intervention, ainsi qu'à une réduction importante de la
fréquence par la suite", souligne Mme Conrod. La consommation de
drogue a été déterminée au moyen de questionnaires anonymes remplis
par les participants tous les six mois au cours des deux ans ayant
suivi le début de l'étude. Le protocole d'évaluation incluait un
certain nombre de procédures pour écarter les données provenant
d'élèves qui faisaient de fausses déclarations.
Les amateurs de sensations fortes ont besoin d'un degré élevé de
stimulation, et ils sont prêts à prendre plus de risques que la
moyenne pour vivre des expériences excitantes. Ils tendent également
à présenter peu d'inhibitions et une faible tolérance à l'ennui. "Les
personnes à la recherche de sensations fortes sont particulièrement
à risque de consommer du cannabis parmi cette tranche d'âge. Il est
possible que d'autres traits de personnalité prédisposent les sujets
plus âgés à ce comportement", affirme M. Mahu. "Des
recherches futures pourraient déterminer les motivations qui mènent
à la consommation de cannabis chez les personnes appartenant à
d'autres types de personnalité à risque. Il serait alors possible
d'élaborer des programmes d'intervention aussi efficaces pour elles
que celui-ci pour les amateurs de sensations fortes".
Selon Mme Conrod, auteure en chef, "en raison des effets
délétères bien documentés d'une utilisation hâtive de la marijuana
chez les adolescents, la prévention et le retardement de ce
comportement sont de la plus grande importance pour le public,
particulièrement au moment où la société expérimente diverses
politiques publiques pour encadrer les méfaits liés au cannabis".
Source :
Can Cannabis Use be Prevented by Targeting Personality Risk in
Schools (en cours de publication).
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