26 février 2015

 

L'informatique biologique franchira-t-elle la Barrière de Moore ?

 
Comment augmenter la puissance de nos ordinateurs ? Cette question devient un casse-tête de plus ne plus complexe pour les géants de la micro-électronique.

La miniaturisation électronique, sur laquelle repose la montée en puissance des processeurs actuels, commence en effet à montrer ses limites. Des chercheurs ont donc imaginé des formes d'ordinateurs complètement différentes, se basant sur des principes de bio-chimie et la synthèse de protéines grâce à l'ADN. Dans cette quête de l'ordinateur de demain, des scientifiques de l'Université hébraïque de Jérusalem ont récemment fait une avancée importante.

Les limites de l'électronique moderne

Nos ordinateurs et smartphones ont atteint des puissances de calcul qui étaient difficilement imaginables il y a encore cinquante ans. Ce qui tient aujourd'hui dans la paume de notre main nécessitait la surface d'un terrain de tennis dans les années 1970. Cette croissance exponentielle de la capacité des processeurs, que l'on nomme souvent "loi de Moore", a été permise par la miniaturisation des composants. Pour cela, les chercheurs et ingénieurs travaillant dans la micro- et nano-électronique ont invariablement repoussé les limites de la physique au fil des années, en permettant de graver les transistors (unités logiques de base des microprocesseurs) de plus en finement dans le silicium. Ainsi, les dernières avancées technologiques permettent des résolutions de gravure de l'ordre de 20 nanomètres (20 x 10-9 mètres), ce qui permet de concentrer plusieurs centaines de millions de ces transistors sur quelques centimètres carrés. Cependant, nombreux prédisent que cette course vers l'infiniment petit pourrait bientôt s'arrêter pour une simple raison physique : nous atteignons des échelles de l'ordre de la taille de l'atome (environ 10-8 mètres), qui nous sont impossibles à dépasser. Autrement dit, la "loi de Moore" deviendrait alors la "barrière de Moore".

Le bio-ordinateur

Face à cette limite que les chercheurs ont su identifier depuis longtemps, des scientifiques ont réfléchi à la possibilité de construire des ordinateurs aux fondations technologiques fondamentalement différentes. C'est ainsi qu'a notamment émergé le concept de bio-ordinateur.

L'idée principale est de mettre à profit les importants progrès en nano-biotechnologie pour concevoir des systèmes biologiques réagissant à leur environnement en produisant une réponse sous forme de signal chimique ou électrique. Il sera alors théoriquement possible de programmer des organismes biologiques pour réaliser des calculs particuliers, à l'image des ordinateurs classiques que nous pouvons programmer à souhait. A terme, l'intérêt majeur de ces systèmes biologiques serait leur capacité à se répliquer et s'organiser de façon autonome, permettant ainsi d'augmenter à faible coût la puissance de calcul et la complexité de ces automates biologiques.

Des nombreux obstacles restants

Le développement de la bio-informatique n'en est encore qu'à ces débuts et de nombreux défis restent à relever avant de la retrouver dans notre salon. Une équipe de recherche internationale dirigée par le professeur Danny Porath de l'Université hébraïque de Jérusalem a récemment fait une avancée importante dans le domaine. Cette équipe travaille sur l'utilisation de longues molécules d'ADN pour réaliser des circuits électriques complexes pouvant s'assembler de façon autonome. Cependant, jusqu'ici, aucune équipe de recherche n'avait réussi à mesurer de façon fiable et reproductible des courants électriques dans des molécules d'ADN suffisamment longues. Le professeur Porath et son équipe ont justement permis de réaliser une percée dans ce domaine en décrivant un protocole d'expérience permettant de mesurer des courants électriques sur certaines molécules d'une longueur de l'ordre de 100 nanomètres, laissant la porte ouverte à des structures réellement complexes. Cette avancée apparaît comme suffisamment importante pour relancer l'intérêt des chercheurs dans cette technologie, et peut-être à terme voir émerger une nouvelle électronique.


Sources :

Long-range charge transport in single G-quadruplex DNA molecules (Nature)

Breakthrough in molecular electronics paves the way for DNA-based computer circuits in the future (The Hebrew University of Jerusalem)

DNA-based electrical circuits are almost a thing of the present (TechTimes)

 

 

 
Le professeur Danny Porath
 

 

 
 
 

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