Une équipe internationale de
chercheurs dirigée par des scientifiques de l’Université McGill a
découvert que la consommation excessive de sel "reprogramme" le
cerveau, interférant ainsi avec un mécanisme de sécurité naturel qui
empêche normalement la tension artérielle de s’élever.
Bien qu’ils aient déjà établi l’existence d’un lien entre le sel et
l’hypertension, les scientifiques n’avaient pas encore déterminé
comment une consommation élevée de sel provoque une élévation de la
tension artérielle. En étudiant le cerveau de rats, une équipe
dirigée par le professeur Charles Bourque, de la Faculté de médecine
de l’Université McGill et chercheur au Centre de recherche en
neurosciences à l'Institut de recherche du Centre universitaire de
santé McGill, a découvert que la consommation de grandes quantités
de sel alimentaire provoquait des modifications de circuits
cérébraux clés.
"Nous avons découvert que la consommation de fortes quantités de
sel alimentaire pendant une certaine période chez le rat entraînait
une altération biochimique au niveau des neurones qui libèrent la
vasopressine dans la circulation générale", explique le
professeur Bourque. "Cette altération, qui touche une molécule
neurotrophique appelée BDNF (brain-derived neurotrophic factor, ou
facteur neurotrophique dérivé du cerveau), empêche l’inhibition de
ces neurones par d’autres cellules".
Les résultats de cette étude, publiés dans la revue spécialisée
Neuron, révèlent qu’une forte consommation de sel empêche
l’inhibition, par le circuit de détection de la tension artérielle,
des neurones à vasopressine. La neutralisation de ce mécanisme de
sécurité naturel permet à la tension artérielle de s’élever lorsque
de fortes quantités de sel sont consommées pendant une longue
période de temps.
Si cette récente découverte apporte un nouvel éclairage sur le lien
entre la consommation de sel et la tension artérielle, des travaux
plus poussés seront nécessaires afin de déterminer de nouvelles
cibles susceptibles d’être explorées pour la mise au point
d’interventions thérapeutiques. Les questions suivantes pourraient
permettre d’orienter de nouvelles études : l’effet de
reprogrammation peut-il également être observé chez les humains? Si
tel est le cas, comment peut-il être neutralisé ?
Entre-temps, le professeur Bourque estime que le message demeure le
même : il faut limiter sa consommation de sel.
Des scientifiques du Centre des sciences de la santé de l’Université
du Nord du Texas, du Neurocentre Magendie, en France, et du Centre
de neuroendocrinologie de l’Université d’Otago, en Nouvelle-Zélande,
ont également apporté leur contribution à cette étude, qui a été
financée par les Instituts de recherche en santé du Canada, les
Instituts nationaux de la santé des États-Unis et le Fonds de
recherche du Québec–Santé.
Source :
High Salt Intake Increases Blood Pressure via BDNF Mediated
Downregulation of KCC2 and Impaired Baroreflex Inhibition of
Vasopressin Neurons, par Katrina Y. Choe, Su Y. Han, Perrine
Gaub, Brent Shell, Daniel L. Voisin, Blayne A. Knapp, Philip A.
Barker, Colin H. Brown, J. Thomas Cunningham et Charles W. Bourque,
publié le 22 janvier 2015 dans la revue spécialisée Neuron.
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