Les scientifiques du Centre Helmholtz
pour les matériaux et l'énergie (HZB)
de Berlin étudient un catalyseur à base de manganèse permettant la
conversion de la lumière en énergie chimique. Ils viennent de
franchir une étape importante en définissant avec précision les
différents états des électrons dans ce dispositif innovant,
permettant ainsi une meilleure compréhension de la photosynthèse
artificielle.
La transformation directe à moindre énergie de la lumière du soleil
en énergie chimique répondrait grandement aux préoccupations
énergétiques actuelles. Ce phénomène existe déjà dans la nature où
les plantes vertes ont développé la photosynthèse : elles utilisent
la lumière du soleil pour synthétiser, à partir d'eau et de dioxyde
de carbone, des substances riches en énergie telles que les sucres.
Cependant, les cellules végétales, au sein desquelles ces
transformations ont lieu sont très complexes et très sensibles. Les
scientifiques essayent par des procédés catalytiques de simuler ces
processus dans des systèmes artificiels dans la perspective d'un
usage commercial futur.
Jusqu'à présent, les scientifiques de Berlin étaient parvenus à
stocker jusqu’à 5% de l’énergie solaire de manière chimique sous
forme d’hydrogène au moyen d'une simple cellule solaire, avec
l'espoir de porter cette capacité à 9% dans un proche l’avenir.
(*)
L'avantage de la photosynthèse artificielle est qu'elle ne fait pas
appel à diverses procédures "couplées", telles par exemple les
techniques où l'électricité solaire ou éolienne est utilisée pour
produire de l'hydrogène par électrolyse de l'eau, induisant un
surcoût prohibitif. Au contraire, la cellule solaire au silicium
utilisée par les chercheurs berlinois est combinée à une couche de
métal, entrant elle-même en contact avec une couche d'eau
supplémentaire. Par excitation de la lumière solaire, une tension
apparaît entre l'oxyde de métal et la cellule, fractionnant les
molécules d'eau en molécules d'hydrogène et d'oxygène.
Des catalyseurs pour améliorer le
rendement
Actuellement, l'équipe scientifique du centre HZB s'intéresse aux
catalyseurs chimiques pour le craquage de l'eau afin d'obtenir une
performance similaire à celle des enzymes photosynthétiques. Ce
procédé nécessite des transducteurs d'énergie, les plus performants
étant des complexes de manganèse intégrés dans une matrice de
Nafion, un polymère du téflon. En contact avec des composés de
manganèse, le Nafion forme des nanoparticules d'oxyde de manganèse,
qui catalysent l'oxydation de l'eau lorsqu'elle est exposée à la
lumière, synthétisant de l'oxygène et de l'hydrogène. Ce dernier
peut ensuite être filtré et stocké pour une utilisation énergétique
postérieure.
Parmi les différents composés de manganèse, le complexe Mn(III) est
considéré comme le plus efficace pour la formation d'oxyde de
manganèse. Le professeur Emad Aziz, directeur du centre HZB,
confirme ainsi ses objectifs : "Nous améliorons actuellement nos
méthodes afin de pouvoir étudier sur la durée les comportements
énergétiques de ces nouveaux matériaux lors des réactions
catalytiques". L'objectif est d'obtenir par la chimie de
synthèse une compréhension précise de ces processus et de ces
matériaux pour développer des systèmes de conversion directe de la
lumière en énergie chimique. Cette innovation pourrait être à la
base d'un stockage de l'énergie solaire, respectueux de
l'environnement et rentable.
Ces résultats ont été obtenus dans le cadre d'une coopération de la
HZB avec le "School of Chemistry" et le "ARC Centre of
Excellence for Electromaterials Science" de l'Université Monash
de Melbourne (Australie). L'équipe était dirigée par le professeur
Emad Aziz, directeur de l'HZB et le professeur Leone Spiccia de
l'Université Monash.
(*) L'efficacité énergétique de la conversion de l'énergie
solaire en énergie biochimique par la photosynthèse chez les plantes
avoisine généralement 3 à 6 %. La lumière absorbée qui n'est pas
convertie en énergie métabolique est essentiellement dissipée sous
forme de chaleur, une petite fraction (1 à 2 %) étant réémise par
fluorescence de la chlorophylle à une plus grande longueur d'onde —
donc, plus rouge que la lumière incidente.
Sources :
>>> The path to artificial photosynthesis (HZB)
>>> Electronic structural insights into efficient MnOx
catalysts (Journal of Materials Chemistry A)
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