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21
janvier 2015 |
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Le comportement des
objets trans-neptuniens suggère la présence d'au moins deux planètes
inconnues au-delà de Pluton |
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Il devrait exister au moins deux
planètes inconnues cachées bien au-delà de Pluton, dont l'influence
gravitationnelle détermine l'irrégularité des orbites et de la
distribution des objets observés au-delà de Neptune.
Depuis plusieurs décennies, les astronomes spéculent sur l'existence
d'une planète restant à découvrir aux confins de notre Système
solaire. Aujourd'hui, une étude et des simulations effectuées par
une équipe de recherches de l'Université Complutense de Madrid (UCM)
et de l'Université de Cambridge (UC)
semblent démontrer que non seulement une, mais au moins deux
planètes doivent exister pour expliquer le comportement orbital
d'objets trans-neptuniens extrêmes (extreme trans-Neptunian
objects, ou ETNOs). Si elle est confirmée, cette hypothèse
pourrait révolutionner le modèle de notre Système solaire.
L'hypothèse la mieux acceptée à ce jour établissait que les orbites
de ces objets, qui se déplacent bien au-delà de Neptune, devraient
être distribuées au hasard. Ainsi, leurs caractéristiques devraient
remplir une série de conditions bien précises : avoir un demi-grand
axe d'une valeur proche de 150 UA (Unités Astronomiques, valant la
distance moyenne Terre-Soleil), une inclinaison approchant 0° et un
argument ou
angle de périhélie (ou argument du périastre, direction du point
de l'orbite le plus proche de notre Soleil) également proche de 0°
ou 180°.
Pourtant, les valeurs observées d'une douzaine de ces objets parmi
les mieux connus sont très différentes : les valeurs des demi-grand
axes sont très dispersées (entre 150 et 525 UA), l'inclinaison
moyenne de leurs orbites est d'environ 20° et leur angle de
périhélie s'établit à -31°, très éloignée des 180°.
"Les excès inattendus présentés par ces objets dans leurs
paramètres orbitaux nous incitent à penser que certaines forces
inconnues modifient la répartition des éléments orbitaux des ETNOs
et nous considérons que l'explication la plus probable est qu'ils
sont influencés par d'autres planètes inconnues existant au-delà de
Neptune et Pluton", explique Carlos de la Fuente Marcos,
chercheur à l'UCM et co-auteur de l'étude. "Leur nombre exact est
incertain, étant donné que les données en notre possession sont
encore limitées, mais nos calculs suggèrent qu'il existe au moins
deux planètes supplémentaires, et probablement plus, dans les
limites de notre système solaire", ajoute l'astrophysicien.
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Quelques-uns des principaux objets trans-neptuniens connus à ce
jour. |
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Pour réaliser l'étude, qui est publiée
sous forme de deux articles dans la revue
Monthly
Notices of the Royal Astronomical Society Letters, les
chercheurs ont analysé les effets du mécanisme Kozai, décrivant la
perturbation gravitationnelle exercée par un grand corps sur
l'orbite d'un autre objet à la fois beaucoup plus éloigné et
beaucoup plus petit. À titre de référence, ils ont analysé comment
ce mécanisme s'applique dans les perturbations subies par la comète
96P/Machholz1 sous l'influence de Jupiter.
Deux problèmes à résoudre
Malgré leurs résultats surprenants, les auteurs reconnaissent que
leur hypothèse se heurte à deux problèmes. D'une part, leur
proposition va à l'encontre des prédictions des modèles actuels sur
la formation du système solaire, qui contredisent l'existence
d'autres planètes se déplaçant sur des orbites circulaires au-delà
de Neptune.
Cependant, la découverte récente au moyen du radiotélescope ALMA
d'un disque protoplanétaire entourant à plus de 100 Unités
Astronomiques l'étoile HL Tauri, plus jeune et plus massive que le
Soleil, suggère que des planètes peuvent se former à plusieurs
centaines d'unités astronomiques du centre du système.
D'autre part, l'équipe reconnaît que l'analyse est basée sur un
échantillon de quelques objets (exactement 13), mais ils soulignent
que dans les prochains mois ce nombre sera augmenté, fournissant à
l'étude un échantillon beaucoup plus vaste. "Si cette observation
est confirmée, nos résultats peuvent être vraiment révolutionnaires
pour l'astronomie", annonce Marcos de la Fuente.
L'année dernière, deux chercheurs des États-Unis ont découvert une
planète naine appelée 2012 VP113 à l'intérieur du le nuage d'Oort,
juste au-delà de notre Système solaire. Les découvreurs estiment que
son orbite est influencée par la présence possible d'une
super-Terre, à la fois sombre et glacée, jusqu'à dix fois plus
grande que notre propre planète.
Jean Etienne
Sources et références :
Carlos de la Fuente Marcos, Raúl de la Fuente Marcos, Sverre J.
Aarseth. "Flipping
minor bodies: what comet 96P/Machholz 1 can tell us about the
orbital evolution of extreme trans-Neptunian objects and the
production of near-Earth objects on retrograde orbits".
Monthly Notices of the Royal Astronomical Society 446(2):1867-1873,
2015.
C. de la Fuente Marcos, R. de la Fuente Marcos. "Extreme
trans-Neptunian objects and the Kozai mechanism: signalling the
presence of trans-Plutonian planets ?" Monthly Notices of
the Royal Astronomical Society Letters 443(1): L59-L63, 2014.
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Images de la
découverte de 2012 VP113, effectuées le 5 novembre 2012 à deux
heures d'intervalle.
Crédit : Scott S. Sheppard (Carnegie Institution for Science). |
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