|
Des équipes de chercheurs de
l'Université de Tohoku (Japon) ainsi que de de l’Institut national
de l’acier et des alliages de Russie travaillent actuellement sur le
verre métallique, un matériau de nouvelle génération prometteur dans
de nombreuses technologies de pointe.
Le verre métallique est un matériau homogène amorphe sans structure
cristalline qui n’a rien à voir avec le verre conventionnel au point
qu’il n’est même pas transparent. Si le nouveau matériau porte le
nom de verre, c’est simplement par analogie avec le verre commun qui
ne possède pas de structure cristalline.
Ces matériaux relativement récents sont produits depuis 1960 par
refroidissement ultra-rapide d'un alliage métallique, mais jusqu'à
présent uniquement sous la forme d'un ruban n'excédant pas 0,1 mm
d'épaisseur. Comme dans le cas du verre de silice, l'alliage fondu,
refroidi jusqu'à l'état solide ne sera amorphe que si la température
de fusion s'abaisse suffisamment vite pour que les atomes
constitutifs de l'alliage n'aient pas le temps de s'organiser selon
une structure cristalline. Il est donc nécessaire de refroidir le
liquide à une vitesse critique telle qu'une température inférieure
au seuil de solidification soit dépassée avant que celle-ci ne se
produise. Pour obtenir un verre métallique, cette vitesse de
refroidissement critique est de l'ordre de 100.000 à 10.000.000°K
par seconde, ce qui est irréalisable dans une masse métallique
quelque peu importante où la diffusion de la chaleur est plus lente.
Peu à peu, de nouveaux alliages de métaux ont été mis au point
permettant d'obtenir un verre métallique sans recourir à de telles
vitesses de trempe, portant l'épaisseur critique dans une fourchette
0,3 à 3 mm. Puis à partir de l’année 1988, un nombre croissant de
systèmes amorphisables sous forme massive ont été découverts. Tout
d’abord dans les systèmes à base magnésium, puis base zirconium,
base fer, base cobalt, etc. (*)
L'intérêt du verre métallique
Le verre métallique est d'un ordre de grandeur plus résistant que
les matériaux conventionnels. Mais il est surtout très résistant à
la corrosion, à l'oxydation, et surtout à l'usure. Il est déjà
utilisé dans certains secteurs industriels, mais possède deux
défauts importants: une plasticité médiocre, et un coût élevé qui
empêchent son utilisation à grande échelle.
Alexei Solonine, directeur de la chaire des métaux non-ferreux de
l’Institut de l’acier et des alliages a évoqué les missions
assignées à l’équipe russo-japonaise : "Nous avons rassemblé dans
notre Institut une équipe de chercheurs jeunes et dynamiques qui
travaillent sur de nouveaux matériaux amorphes et composites à base
de verre métallique. Le verre métallique existe depuis assez
longtemps mais leur domaine d’application est actuellement limité
par leur taille. En effet, ce matériau existe soit sous forme de
ruban fin, ou de granules faisant à peine quelque dixièmes de mm.
Nous travaillons donc sur des verres métalliques massifs dont les
granules seraient de 5 mm, c’est beaucoup pour les matériaux
amorphes. Les verres métalliques ont également un autre défaut : ils
sont solides mais très fragiles. Il n’y a cela rien d’étonnant parce
que c’est aussi la propriété du verre à vitres classique. Notre
mission consiste à accroître leur plasticité à l’aide de matériaux
composites et à réduire les frais de production. En fait, la plupart
de ces matériaux sont à base de palladium ou de zirconium qui sont
très coûteux. Nous tâchons de réduire les frais en passant à
d’autres bases comme le fer, le cobalt, le titane et le magnésium.
Le magnésium procure d’autres avantages également ; il améliore les
propriétés mécaniques et réduit le poids…".
Les verres métalliques sont un matériau prometteur pour le secteur
aérospatial, l’industrie automobile, l’électronique, la
micromécanique y compris pour les montres, les smartphones, les
transformateurs et d’autres dispositifs où la résistance élevée à
l’usure et la grande qualité de surface ont une valeur de principe.
Les verres métalliques à base de titane qui sont hautement
résistants à la corrosion peuvent également servir d’implants dans
la médecine et être utilisés pour la fabrication des instruments
chirurgicaux. Dans l’industrie du sport, on peut en faire des
raquettes de tennis et des crosses pour golf qui doivent être très
élastiques.
L’équipe composée de 30 chercheurs se donne pour objectif la
création d’une nouvelle classe de matériaux dits hybrides,
c’est-à-dire combinant les verres métalliques avec d’autres
matériaux, par exemple, avec les polymères, pour faire le mieux
valoir les propriétés de chacun d’eux. Le projet est conçu pour deux
ans et est dirigé par Dmitri Louzguine, actuellement professeur de
l’Université de Tohoku.
(*) Pour des raisons encore mal
définies, les métaux composant l'alliage doivent être au minimum de
3 (souvent 5 et plus), et la différence des poids atomiques entre
les différents constituants doit être d'au moins 12%.
|
|