Ebola est à ce jour l'une des infections
transmissibles les plus létales. Sa récente progression en a fait
une menace hautement prioritaire pour la santé publique de plusieurs
pays africains. Aucun traitement thérapeutique définitif n'est
encore sur le marché. Le ZMapp est le produit qui s'en approche le
plus. Malheureusement, ses stocks se sont rapidement épuisés et sa
production nécessite un temps précieux, qui coûte la vie de nombreux
patients.
CollPlant, une société israélienne de production massive
de protéines humaines à base de plantes de tabac, pourrait prêter
main forte aux producteurs de ZMapp.
Lorsqu'Ebola se réveille...
Le virus Ebola appartient à la famille des Filoviridae (filovirus à
ARN de forme filamenteuse). Il provoque une maladie grave, souvent
mortelle. Il s'agit d'une fièvre hémorragique virale aiguë
accompagnée d'une atteinte sévère de l'hémostase et au système
immunitaire, conduisant à une forte immunodépression.
Cette maladie est apparue pour la première fois en 1976, lors de
deux flambées simultanées à Nzara (Soudan) et à Yambuku (République
démocratique du Congo) [*].
L'épidémie qui sévit actuellement en Afrique de l'Ouest (dont les
premiers cas ont été notifiés en mars 2014) est la plus importante
et la plus complexe depuis 1976. Le virus se transmet à l'Homme à
partir d'animaux sauvages et circule ensuite au sein des populations
humaines par contact avec les fluides corporels de personnes
présentant les symptômes de la maladie (à l'issue de la période
d'incubation) ou par voie entérale (par l'intermédiaire du tube
digestif).
S'il n'existe pour l'heure aucun traitement ni vaccin validé contre
le virus Ebola, de nombreux protocoles expérimentaux sont testés par
les scientifiques du monde entier. Un de ces traitements a été
administré à six professionnels de la santé contaminés par le virus,
provoquant des effets mitigés mais encourageants : le ZMapp.
Le tabac à la rescousse
C'est la société américaine installée en Californie
Mapp
Biopharmaceutical qui est à l'origine de ce sérum [*].
Il a vu le jour grâce à un programme financé par le gouvernement et
l'armée américains, en collaboration avec les autorités sanitaires
canadiennes [*].
Ce médicament expérimental est composé de trois anticorps
monoclonaux (molécules dirigées spécifiquement contre une autre
molécule et permettant sa destruction par le système immunitaire)
humanisés [*].
La particularité de ces anticorps ? Ils sont fabriqués à partir de
tabac, ou nicotiana. Le virus Ebola est préalablement fusionné avec
les gènes d'un virus infectieux pour le tabac. Il est ensuite
injecté dans des plantes de tabac produisant alors des anticorps
contre le virus. Ce sont ces anticorps extraits des plantes qui
constituent la recette du cocktail ZMapp.
Le ZMapp se montre pour l'instant efficace, en tout cas beaucoup
plus que tout autre traitement connu à ce jour. Son problème majeur
réside dans sa quantité disponible. En effet, les maigres stocks de
ZMapp sont rapidement épuises et il faut des mois pour en
reconstituer ne serait-ce que de modestes quantités.
Et si CollPlant s'en mêlait ?
CollPlant,
société israélienne fondée par le professeur Oded Shosheyvov de
l'Université hébraïque de Jérusalem, est une entreprise pionnière
dans le développement de protéines recombinées grâce aux plantes de
tabac. Le Pr Shosheyvov explique que CollPlant est la première
société au monde à utiliser les plantes de tabac pour fabriquer et
commercialise à grande échelle des protéines humaines.
Son produit phare ? Le collagène humain, élément essentiel pour la
réparation des os et des articulations. Alors que certains utilisent
du collagène artificiel provenant de matériaux extraits de vaches et
de cochons, d'autres prélèvent du collagène sur des corps humains,
ce qui est efficace mais très limité. CollPlant, en utilisant des
plantes de tabac génétiquement modifiées pour imiter la synthèse de
protéines humaines, permet la production de véritable collagène
humain. Sa production nécessite la synthèse de cinq gènes humains,
ce qui est beaucoup plus complexe à réaliser que ce que proposent la
plupart des autres entreprises du domaine.
CollPlant n'est ni à l'origine de la méthode de "pharming",
consistant à insérer des gènes codant pour des produits curatifs
chez des animaux ou des plantes ne les exprimant pas initialement,
ni à l'origine de la production de matériaux humains issus de pantes
de tabac. Mais grâce à son expertise en nanotechnologies,
l'entreprise israélienne est la seule à pouvoir réaliser une
production massive, contrôlée, quantifiable in vivo et ajustable de
ces matériaux.
Le professeur Oded Shosheyvov propose aujourd'hui son aide aux
créateurs du ZMapp pour fournir une production prodigieusement plus
rapide et efficace [*].
L'avenir nous dira si cette collaboration prendra forme. En
attendant, il semble bien que si "fumer tue", cultiver du tabac peut
aussi avoir des effets très positifs sur la santé.
Source : Veille
électronique internationale - Bulletins ADIT
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