Des
bioingénieurs de l'Université de Rome Tor Vergata et de l'Université
de Montréal ont conçu un outil à base d'ADN capable de détecter des
variations chimiques caractéristiques des cellules cancéreuses et
qui pourrait un jour servir à cibler des médicaments dans les
cellules tumorales.
Ce
nanodétecteur mesure les variations de pH – c'est-à-dire l'acidité
(bas pH) ou l'alcalinité (haut pH) – à l'échelle nanométrique. Un
grand nombre de biomolécules, comme les enzymes et les protéines,
sont étroitement régulées par de légers changements de pH. Ces
changements induisent à leur tour des fonctions biologiques comme la
catalyse enzymatique, l'assemblage des protéines, les fonctions
membranaires et la mort cellulaire. Il y a également un lien étroit
entre le cancer et le pH.
Les
cellules cancéreuses ont généralement un pH inférieur à celui des
cellules saines. "Dans les organismes vivants, ces légers
changements de pH apparaissent généralement sur de petites surfaces
mesurant quelques centaines de nanomètres", explique le Pr
Francesco Ricci, auteur principal. "Des détecteurs ou des
nanomachines capables de mesurer des changements de pH à cette
échelle seraient très utiles pour plusieurs applications dans les
domaines de l'imagerie in vivo, du diagnostic clinique et de
l'administration des médicaments."
"L'ADN
est le matériau idéal pour concevoir des détecteurs ou des machines
fonctionnant à l'échelle nanométrique", ajoute le Pr
Vallée-Bélisle, auteur principal. "En utilisant une séquence
d'ADN spécifique formant une triple hélice sensible au pH, nous
avons conçu un nanodétecteur polyvalent qui peut être "programmé"
pour émettre une fluorescence à un pH bien précis." La
fluorescence est une émission de radiations dans le spectre de la
lumière visible causée par un échange d'énergie. "Cette capacité
que nous avons de "programmer" le détecteur est une fonction clé
pour les applications cliniques. Nous pouvons ainsi concevoir un
nanodétecteur qui émet une fluorescence seulement quand le pH
atteint une valeur donnée – une valeur caractéristique d'une
certaine maladie, par exemple", explique le premier auteur,
Andrea Idili.
À
l'avenir, cette nanotechnologie pourrait trouver des applications
dans le développement de plateformes d'administration de médicaments
capables de libérer les agents chimiques thérapeutiques uniquement à
proximité des cellules tumorales.
Note :
Ces travaux de recherche ont bénéficié du soutien du Conseil
européen de la recherche et du Conseil de recherches en sciences
naturelles et en génie du Canada. Andrea Idili et Francesco Ricci,
du Département de chimie de l'Université de Rome Tor Vergata et
Alexis Vallée-Bélisle, du Département de chimie et du Département de
biochimie de l'Université de Montréal, ont publié un article
intitulé Programmable pH triggered DNA nanoswitches dans le Journal
of the American Chemical Society.
Source :
Programmable pH-Triggered DNA Nanoswitches |