La Chine développe un nouveau lanceur
de très grande puissance en vue de l'exploration de la Lune ainsi
que des futures missions dans l'espace profond, révèlent aujourd'hui
les médias d'Etat.
Ce n'est pas une surprise. On savait déjà que la Chine, après avoir
maîtrisé le vol humain, ambitionne de disposer de sa propre station
spatiale, dont un embryon est déjà en orbite (Tiangong-1), puis de
déposer des hommes sur le sol de notre satellite. Mais les fusées
actuelles ne peuvent satisfaire à la réalisation d'un tel programme,
à moins d'accepter la complexification de lancements multiples et
d'assemblages en orbite.
D'aucuns rétorqueront que la Station Spatiale Internationale (420
tonnes) a été réalisée sur ce scénario. D'autres feront
judicieusement remarquer que les 36 missions de la navette spatiale
nécessaires à l'assemblage de cet immense Meccano (sans compter les
lancements Proton et Soyouz) auront coûté bien plus que les quatre
lancements qui auraient amplement suffi en utilisant l'antique
Saturne 5 lunaire, capable de satelliser 120 tonnes en orbite basse.
Reflet du programme de conquête lunaire lancé par le Président
Kennedy, la Saturne 5 avait été conçue dans ce but. Le principe d'un
tir direct du "train spatial" complet vers notre satellite avait en
effet été jugé plus opportun qu'un assemblage en orbite, tandis que
l'URSS (avec trois ans de retard sur les USA) concevaient dans le
même but leur fusée N1, dont les quatre lancements s'étaient conclus
par un feu d'artifice de légende…
Une avancée prudente
Mais toute comparaison s'arrête là. Car si les Saturne 5 et autres
N1 ont été développées dans la précipitation sur fond de guerre
froide, la Chine non seulement dévoile ses intentions (l'existence
de la N1 avait été révélée qu'après la chute de l'URSS, soit 20 ans
plus tard), mais fait preuve d'une sage prudence dans ses
réalisations.
Li Tongyu, chef des programmes aérospatiaux à l'Académie chinoise
des technologies des véhicules de lancement, déclare ainsi à la
presse : "Nos lanceurs actuels, y compris le Longue Mache-5 (25
tonnes en orbite basse, ndlr), dont le premier lancement
interviendra bientôt, seront en mesure de poursuivre les activités
spatiales programmées pour les 10 prochaines années. Mais pour les
programmes spatiaux à long terme de la nation, leurs capacités ne
suffiront pas".
Et il annonce dans la foulée la réalisation future d'un tout nouveau
lanceur d'environ 3000 tonnes et d'un diamètre d'environ 10 mètres,
dont le premier tir serait effectué aux environs de 2028. Cette
"Longue Marche 9", ainsi dénommée par China Daily, serait
équipée de moteurs à kérosène et oxygène liquide de 460 tonnes de
poussée chacun pour le premier étage, et de 220 tonnes de poussée à
hydrogène/oxygène liquides pour les étages supérieurs. Elle serait
capable de satelliser dans un premier temps 130 tonnes en orbite
basse.
Li Jinghong, un concepteur de l'Académie des Sciences chinoise, a
déclaré cette fusée serait non seulement utilisée pour des missions
vers le satellite naturel de la Terre, mais aussi pour d'autres
projets d'exploration de l'espace profond.
Et pendant ce temps-là…
On ne peut s'empêcher de comparer cette annonce avec les intentions
de la Nasa, dont le Space Launch System (SLS) devrait décoller pour
la première fois en 2018 avec une charge utile de 70 tonnes. Ou
encore de la Russie, avec l'annonce en octobre dernier par Yuri
Makarov, responsable de l'Agence spatiale russe Roscosmos, de
l'approbation par Vladimir Poutine de la mise en chantier d'un
lanceur d'une capacité de 150 tonnes. Avec chaque fois en toile de
fond la Lune, l'espace profond.
Voir aussi sur notre site :
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L’Inde et la Chine accèdent progressivement aux postes-clés de
l'exploration spatiale
Sources (entre autres) :
China Daily, English-People Daily, Space Daily
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